Longtemps délaissé par le public et la critique, « Madhouse » mérite bien mieux que les a priori et jugements hâtifs dont il fut victime, résultat d’une production chaotique

Madhouse (1974)

Réalisé par Jim Clark

Ecrit par Ken Levison et Greg Morrison d’après le roman d’Angus Hall

Avec Vincent Price, Peter Cushing, Robert Quarry, Natasha Pyne, Adrienne Corri, Linda Hayden,…

Direction de la photographie : Ray Parslow / Direction artistique : Tony Curtis / Montage : Clive Smith / Musique : Douglas Gamley

Produit par Max Rosenberg et Milton Subotsky pour Amicus Productions et AIP

Horreur

92mn

UK / USA

Paul Toombes (Vincent Price) est un acteur hollywoodien célèbre pour avoir incarné à l’écran Mr Death. Suite au meurtre de sa fiancée un soir de nouvel an, Toombes est passé par un hôpital psychiatrique et sa carrière ne s’en est jamais remise. Des années plus tard, son vieil ami et ancien scénariste de ses films, Hebert Flay (Peter Cushing) le fait venir à Londres pour tourner une série télévisée basée sur Dr Death. Mais les meurtres s’accumulent et Toombes se demande si c’est lui ?

Après « Scream and Scream Again » (Lâchez les monstres, 1970), AIP et Amicus collaborent à nouveau sur un film d’horreur avec en tête d’affiche la star d’AIP, Vincent Price et l’Anglais Peter Cushing (habitué des productions Hammer et Amicus entre autres) au générique, mais petite nouveauté cette fois-ci, ils ont des scènes en commun !

Autre acteur sous contrat avec AIP qui figure au générique, Robert Quarry, acteur californien que la firme américaine avait réussi à transformer en star grâce au succès de « Count Yorga, Vampire » (1970) et qu’elle voyait bien en successeur d’un Vincent Price vieillissant. La première rencontre Price-Quarry sur le tournage de « Dr Phibes Rises Again » (1972) ne s’était pas très bien passée.

Vincent Price, qui en avait marre d’être prisonnier d’AIP depuis les adaptations de Poe signées Corman, avait de bonnes raisons d’être moyennement coopératif. Il le fut d’autant moins que quand enfin on lui donna un scénario, adapté d’un roman anglais très librement par un publiciste proche du producteur d’AIP dont c’était le premier scénario, il put constater hébété que le résultat était encore pire que la moyenne des productions d’AIP. Price exige que le script soit revu par le beau-frère de son agent anglais, qui au moins était scénariste, Ken Levison., Le problème ? Le tournage est sur le point de commencer.  Levison ré-écrit le scénario pendant la première partie du tournage et Robert Quarry commence à ré-écrire ses dialogues ! Avant que Price et Peter Cushing lui demandent de faire de même avec les leurs !

Finalement Vincent Price et Robert Quarry se retrouvent au moins dans leur détestation du patron d’AIP, Samuel Z. Arkoff, sur lequel Quarry base son rôle de producteur véreux et opportuniste incarné dans le film. Et Peter Cushing intervient pour déminer la tension quand elle devient trop importante entre les deux hommes.

Pour créer la carrière cinématographique de Paul Toombes, personnage central de « Madhouse » et ancienne star du cinéma d’horreur, au moins AIP n’a pas à trop se creuser la tête. De nombreux extraits de ses prestations Poesques sont inclues dans « Madhouse », ce qui permet aussi de ramener à la vie quelques vieilles stars de l’horreur, Boris Karloff et Basil Rathbone entre autres.

Un joyeux bordel mais heureusement le réalisateur Jim Clark, s’adapte plutôt bien au bordel ambiant. Si son CV est plutôt léger en matière de réalisation, Clark est l’un des éditeurs les plus renommés du cinéma britannique, qui avait déjà collaboré avec Jack Clayton (« The Pumpkin Eater » et le film d’horreur culte « The Innocents« ) et John Schlesinger (« Darling » et bientôt « Marathon Man ») et allait être oscarisé exactement dix ans plus tard pour « The Killing Fields » (1984).

Le tournage finit, le montage n’est ironiquement pas jugé suffisamment bon par Amicus (Max Rosenberg intervient pour tenter de « sauver » le film) puis par AIP (Samuel Z. Arkoff a le final cut et se fait plaisir). A sa sortie, le film sera bouder par la presse et le public. Bon il faut rappeler que 1974 c’est aussi la sortie de « Texas Chainsaw Massacre » et que le gothique à la Amicus et à la Hammer est passé de mode.

Pourtant, « Madhouse » qui n’était pas sorti en France à l’époque et sort pour la première fois en support physique grâce à l’éditeur ESC, est loin d’être un film inintéressant. S’il est fortement marqué par le gothique, on y voit également un peu de slasher et de giallo. Et les prestations de Vincent Price et Peter Cushing sont des modèles de sobriété alors que le film aurait pu facilement tourner au grand-guignolesque à la « Theater of Blood » (1973) ou à la « The Abominable Dr. Phibes » (1971). Enfin, sa critique acerbe du milieu de la production cinéma et télé est assez réjouissante.

Combo Blu-ray/DVD/livret FR / Studio ESC (2021). Version originale sous-titrée en français. Bonus : entretient avec Pascal Françaix, livret de 20 pages