Trence Stamp dans "L'obsédé"

Terence Stamp dans « L’obsédé »

Né le 22 juillet 1938 à Londres dans une famille modeste du East End, Terence Stamp deviendra acteur contre la volonté de son père. Ce dernier estimait que le métier d’acteur n’était pas adapté à son milieu social :  « Les gens comme nous ne font pas ce genre de choses. » Heureusement il ne tiendra pas compte de l’avis paternel. Ni son jeune frère Christopher (1944-2012) qui lui se lance dans la musique comme manager (The Who, Jimmy Hendrix,…).

Comme Michael Caine avec lequel il va partager un temps un appartement durant leurs années de dèche, Stamp va réussir une carrière qui va l’amener à travailler avec les plus grands réalisateurs et devenir l’une des figures du Londres des années 60 où il collectionne les conquêtes féminines et s’adonne sans retenue aux drogues. Mais encore une fois comme Caine, il ne va pas non hésiter à tourner dans des films purement alimentaires : « Si vous me voyez dans un mauvais film c’est que je dois payer mon loyer. Si vous me voyez dans un bon film c’est que le loyer est déjà payé ».

Un regard bleu clair perçant, un visage énigmatique, une stature digne et imposante (1m83), Terence Stamp a une présence inimitable qui lui permet de marquer de son empreinte même ses rôles les plus oubliables.

S’il a fait ses débuts au cinéma en 1962 dans « Term of Trial » (en même temps que Sarah Miles) avec à ses côtés pas moins que Laurence Olivier et Simone Signoret, il se fait surtout remarquer dans « Billy Bud » sorti la même année et réalisé par Peter Ustinov. Dans ce drame maritime Stamp joue un jeune matelot qui tue accidentellement le maitre d’armes du navire. Ustinov qui joue également à l’écran le capitaine du navire, jugeait qu’il était « urgent de filmer son visage pur avant qu’il perde son innocence ». Le rôle lui vaudra une nomination du meilleur second rôle aux Oscars !

Innocence qu’il va rapidement perdre en enchainant avec « The Collector » (L’obsédé, 1965) réalisé par William Wyler où il interprète un homme qui  kidnappe une femme (Samantha Eggar)  et la retient en otage juste pour le plaisir de l’avoir à ses côtés. Un rôle qui lui vaut le prix d’interprétation masculine à Cannes (Samantha Eggar remportera pour sa part le prix d’interprétation féminine). On le retrouve l’année suivante dans le parodique et kitsch « Modesty Blaise » aux côtés Monica Vitti (qui joue une sorte de James Bond au féminin) et Dirk Bogarde dans le méchant (et qui arbore pour l’occasion une chevelure blond platine !).

A la fin des années 60, il fait des grands écarts. En 1967, il joue dans l’adaptation littéraire  « Far from the Madding Crowd » aux côtés de Julie Christie (avec qui il entretient une relation très médiatisée) puis dans le premier Ken Loach « Poor Cow« . Et l’année suivante, le voilà aux Etats-Unis pour le western « Blue » réalisé par Silvio Narizzano puis en Italie pour « Teorema » de Pasolini ! Ce dernier film où il joue « le visiteur, un jeune homme énigmatique qui séduit tous les membres d’une famille bourgeoise, restera l’un de ses plus grands rôles. Puis il jouera sous la direction de Fellini dans le film à sketchs « Histoires extraordinaires » (1968). Les Italiens lui portent chance… mais aussi une grande déception : Antonioni le voyait bien dans le rôle principal de son « Blow-Up » mais finalement le rôle reviendra à David Hemmings !

En 1970, il joue un homme qui se réveille de son coma dans lequel il était plongé depuis l’enfance dans l’étrange « The Mind of Mr. Soames » avant de retravailler en Italie, cette fois-ci pour Nelo Risi, dans « Una stagione all’inferno » où il interprète Rimbaud (période africaine).

Suite à une déception amoureuse, Terence Stamp s’éloigne des feux de la rampe et part se ressourcer dans un ashram en Inde. Il faudra attendre 1975 pour le retrouver à l’écran, en France pour le film de SF « Hu-Man » et en Italie pour le drame amoureux se déroulant dans les années 20, « Divina creatura« . Mais c’est sa participation à « Superman » (1978) et sa suite « Superman II » (1980) qui vont lui permettre de retrouver la voie du succès (même s’il y joue un rôle secondaire). Stamp continuera à défendre les films de Richard Donner qui lui ont donné par ailleurs l’occasion de travailler avec Brando, l’une de ses références. Il retrouvera le haut de l’affiche chez Peter Brook dans « Meetings with Remarkable Men » (1979) mais si certains auraient pu être amers suite à cette période de disette, Stamp ne s’en formalise pas, bien au contraire : « La grande bénédiction de cette période, quand j’y repense, c’est que pendant ces années, je suis passé du statut d’acteur principal à celui d’acteur de genre » (interview du BFI, 2013).

Dans les années 80, on retiendra côté britannique le thriller « The Hit » signé Stephen Frears qui signe son grand retour puis « Link » (1986), un film d’horreur où il doit luter pour sa survie face à un chimpanzé meurtrier. Dans la deuxième partie des années 80, il est surtout à Hollywood où il joue aux côtés de Robert Redford (qu’il avait remplacé au pied levé dans « Blue » vingt ans plus tôt) dans « Legal Eagles » (1986) puis joue dans des films aussi divers que le western « Young Guns » (1988), le film de SF « Alien Nation » (1988) ou encore fameux film sur la finance signé Oliver Stone « Wall Street » (1997). A Hollywood il est le plus souvent cantonné à des seconds rôles. Sauf chez Steven Soderbergh qui lui donne un rôle principal fort bienvenue dans « The Limey » (L’Anglais, 1999).

Mais parmi ses prestations durant les années 90, la plus étonnante et la plus marquante reste celle de la travestie Bernadette dans un petit film australien « The Adventures of Priscilla, Queen of the Desert » qui va devenir culte !

Les années 2000 seront pauvres en rôles importants à l’exception de « Walkyrie » (2008) mais c’est un casting d’ensemble. Il prête sa voix à des jeux vidéos (Halo 3,…) ou des séries télé (Smallville). Il apparait chez Tim Burton (Big Eyes,  Miss Peregrine’s Home for Peculiar Children). On le retrouve avec plaisir  dans le rôle principal aux côtés de aux côtés de Vanessa Redgrave dans « Song for Marion » (2012) – si vous supportez les mélos larmoyant !

Quand en 2013, le BFI lui demanda quels étaient les réalisateurs avec lesquels il a le plus aimé travailler, il répond sans hésiter Wyler et Fellini. Parmi ses regrets, il aurait aimé avoir l’occasion de tourner à nouveau pour Fellini et de travailler avec Buñuel. Autre déception, la suite de « The Limey » qu’il avait écrite pour Soderbergh, n’a jamais été tournée (le réalisateur américain étant alors dans une période de hiatus).

Il signera sa dernière apparition en 2021 dans « Last Night in Soho« , le film d’horreur d’Edgar Wright qui se déroule en partie dans le Londres des années 60. La boucle est bouclée.

Terence Stamp est mort le 17 août 2025 à l’âge de 87 ans.

Filmographie sélective

1962 « Term of trial » (Le Verdict) réalisé par Peter Glenville

1962 « Billy Budd » réalisé par Peter Ustinov

1965 « The Collector » (L’obsédé) réalisé par William Wyler

1966 « Modesty Blaise », réalisé par Joseph Losey

1967 « Poor Cow » (Pas de larmes pour Joy), réalisé par Ken Loach

1967 « Far from the Madding Crowd » (Loin des foules déchainées) réalisé par John Schlesinger

1968 « Teorema » (Théorème), réalisé par Pier Paolo Pasolini

1968 « Histoires extraordinaires » (sketch réalisé par Federico Fellini)

1970 « The Mind of Mr. Soames » réalisé par Alan Cooke

1978 « Superman » réalisé par Richard Donner

1979 « Meetings with Remarkable Men » (Rencontres avec des hommes remarquables) réalisé par Peter Brook

1984 « The Hit » (The Hit – Le tueur était presque parfait) réalisé par Stephen Frears

1986 « Link » réalisé par Richard Franklin

1987 « Wall Street » réalisé par Oliver Stone

1994 « Priscilla, folle du désert » réalisé par Stephen Elliott

1998 « The Limey » (L’Anglais) réalisé par Steven Soderbergh