« Alfie » un film complexe, qui questionne les rapports hommes-femmes, avec un personnage central odieux mais pas complètement noir.
Alfie (1966)
(Alfie, le dragueur)
Film de Lewis Gilbert
Ecrit par Bill Naughton d’après sa pièce
Avec Michael Caine, Shelley Winters, Millicent Martin, Eleanor Bron,…
Directeur de la photographie : Otto Heller
Musique : Sonny Rollins
Durée 109 mn
Comédie dramatique
UK
Alfie (Michael Caine) est un sex addict. Issu d’un milieu modeste, il ne cherche pas l’ascension sociale, juste à vivre convenablement, et à profiter des filles sans se prendre la tête. Mais ses relations avec les femmes vont prendre des tournures compliquées dont il se serait bien passé.
Alfie est probablement l’un des rôles les plus célèbres de Michael Caine. Et pour cause, il est juste parfait dans ce rôle pourtant pas vraiment facile. Car Alfie, le séducteur, est l’incarnation du diable pour toute féministe qui se respecte, et on pourrait dire tout simplement pour toute femme. Alfie et un Don Juan des classes ouvrières, lâche et parfaitement immonde avec les femmes qu’il traite à peine mieux que des animaux (en parlant d’elles il les qualifie de « birds » et utilise le pronom « it » qu’on utilise en Angleterre pour les animaux et les objets), et il semble s’étonner quand celles-ci font preuve d’un comportement « humain » (c’est à dire compréhensible pour lui).
Avant de visionner « Alfie », j’étais convaincu qu’il s’agissait d’une comédie légère très typée swinging sixites. Mais pas du tout. Il y a évidemment des moments très drôles, souvent générés par les propos outranciers d’Alfie qui partage avec nous ses sentiments à tout moment en parlant directement à la caméra (un procédé déjà utilisé trois ans auparavant dans « Tom Jones » de Tony Richardson).
Mais sa relation avec la gente féminine provoque souvent un sourire crispé tant on prend en pitié les femmes qu’il a côtoyé et baisé (on ne va pas dire aimé) ou le fils dont il ne saura s’occuper (peut-on être père juste le temps d’un week-end?). On a également droit à une scène d’avortement assez choquante.
Bref, ne regardez pas Alfie un soir où vous souhaitez vous remonter le moral. C’est un film complexe, qui pose des questions intéressantes sur la place de l’homme par rapport aux femmes, avec un personnage central odieux mais pas complètement noir (Michael Caine réussit à rendre le personnage attachant par ses failles – qui sont immenses et finalement se retournent contre lui). On imagine mal un Alfie heureux (il se fait d’ailleurs autant utilisé par les femmes qu’il les utilise). Bien fait pour lui?
Un mot quand même sur le réalisateur Lewis Gilbert. Pas vraiment un réalisateur type des swinging sixites comme on s’y attendrait puisque le bonhomme s’était surtout fait connaitre pour ses films de guerre et films noirs réalisés dans les années 50. C’est d’ailleurs peut être aussi pour ça que le portrait de l’époque dressé dans « Alfie » est bien plus acide et distancié que ne l’aurait peint un réalisateur plus jeune. A noter que ce cinéaste signera par la suite trois James Bond : « On ne vit que deux fois » (1967), « L’espion qui m’aimait » (1977) et « Moonraker » (1979), ainsi qu’un autre film de bonne facture avec Michael Caine dans un rôle très différent « Educating Rita » (1983).
DVD FR. Studio Paramount Pictures (2002). Version originale avec sous-titres français et version française. Bonus : bande annonce