Une satire particulièrement noire des dernières années du règne de Staline. Une farce glaçante avec deux excellents acteurs (Colin Blakely et David Suchet)

Red Monarch (1983)

Réalisé par Jack Gold

Ecrit par Charles Wood d’après Yuriy Korotkov

Avec Colin Blakely, David Suchet, Carroll Baker, Ian Hogg, David Kelly, Fred Lee Own,…

Direction de la photographie : Mike Fash / Montage : Laurence Méry-Clark

Produit par Graham Benson pour Goldcrest

Comédie dramatique

101mn

UK

Forts de ses triomphes au cinéma (Chariots of Fire, Gandhi,…) au début des années 80, Goldcrest décide de se diversifier en pariant sur la production de téléfilms de prestige.

« Red Monarch » fait partie de la première fournée de ces productions à gros budget qui vont malheureusement s’avérer être des gouffres financiers et participeront aux problèmes financiers croissants du fleuron de la production d’outre manche durant les années 80.

« Red Monarch » est une satire à l’humour très noir des dernières années de Staline (qui meurt en 1953). La reconstitution est de grande qualité. La réalisation a été confiée à Jack Gold, pas spécialement connu pour ses comédies mais qui avait réalisé une très bonne satire du service de santé britannique dans « The National Health » (1973).

J’avoue avoir eu quelques difficultés à rentrer dans ce « Red Monarch », même si je suis particulièrement friand d’humour noir. Il faut dire que le film vire plus d’une fois à la farce et c’est assez déstabilisant. Le film n’essaie même pas d’être drôle, juste de pousser dans les extrêmes l’horreur grotesque de Staline et de sa cour.

Dans l’ombre d’un Staline manipulateur et glaçant qui cache sa cruauté sous un air jovial, se tient un personnage encore plus sinistre, Beria, le chef de la police secrète et bourreau de Staline. Manipulateur et criminel qui n’a rien à envier à son maitre,  Beria était également un obsédé sexuel coupable (au bas mot) d’une centaine de viols (il tenait une liste de ses victimes qui étaient ensuite envoyées au goulag ou assassinées).

Les deux acteurs principaux, Colin Blakely (Staline) et David Suchet (Beria) sont formidables, ce qui rajoute au côté tout simplement horrible de cette histoire mais je ne saurais dire si le parti-pris d’user de la farce pour traiter un tel sujet est un bon choix ou pas. Est-ce que ça participe à la trivialisation de son sujet ou le choix du grotesque rend-t-il tout juste supportable l’insupportable ?

Bien entendu, ce « Red Monarch » semble aujourd’hui précurseur d’un film récent qui a traité le sujet de la mort et de la succession de Staline en choisissant également l’angle de l’humour : « The Death of Stalin » (2017).

Le scénario est dû à la plume de Charles Wood, collaborateur de Richard Lester sur « The Knack… and How to Get It » (1975) et « The Bed Sitting Room » (1969). Il s’inspire des écrits du dissident russe Yuriy Korotkov (il y a également un scénariste russe du même nom mais je n’ai pas réussi à savoir s’il s’agissait de la même personne).

En tout cas, « Red Monarch » est une farce au ton très noir qui à l’époque n’a pas trouvé son public (en tout cas pas suffisamment pour que Goldcrest récupère son investissement). Diffusé sur Channel 4 en juin1983 et distribué dans quelques festivals, il a été longtemps oublié. Au début des années 2000, Channel 4 l’a ressorti en DVD et j’ai pu le voir en streaming sur Amazon Prime UK (il n’est pas disponible sur la version française de la plateforme).