Un excellent film noir à l’ambiance très travaillée, le premier film de Seth Holt, et l’avant-dernier film produit par Ealing Studios

Nowhere to Go (1958)

(Le criminel aux abois)

Réalisé par Seth Holt

Ecrit par Seth Holt et Kenneth Tynan d’après le roman de Donald MacKenzie

Avec George Nader, Maggie Smith, Bernard Lee, Geoffrey Keen,…

Direction de la photographie : Paul Beeson / Production design : Peter Proud / Direction artistique : Alan Withy / Montage : Harry Aldous / Musique : Dizzy Reece

Produit par Michael Balcon pour Ealing Films

Crime

100mn

UK / USA

Paul Gregory (George Nader), un escroc canadien installé à Londres monte un coup pour voler les pièces de collection d’une veuve canadienne venue à Londres pour les vendre. Il a même prévu d’être pris et d’être condamné à la prison. Mais il a monté son coup avec Sloane (Bernard Lee) qui doit l’aider à s’échapper de prison et à quitter l’Angleterre contre rémunération. Mais Sloane devient gourmand et les ennuis commencent vraiment !

« Nowhere to Go » est un « british noir » produit par Ealing en 1958, juste un an avant qu’ils ferment boutique. En fait, les fameux studios Ealing (où ont été filmé tous les classiques de la firme) ont déjà été vendus à la BBC en 1955 mais Michael Balcon continue pendant quelques années à produire des films sous le nom de Ealing en partenariat avec la MGM.

Le film est réalisé par Seth Holt, qui a débuté à Ealing en 1944 et qui signe ici son premier long métrage. Si sa carrière en tant que réalisateur est assez mince, on lui doit quand même « Station Six Sahara » (1963) un huis clos intéressant en plein Sahara avec Caroll Baker et surtout pour la Hammer les classiques « Taste of Fear » (1961) et « The Nanny » (1963) ou encore « Blood from the Mummy’s Tomb » (1971) qui restera son dernier film.

Mais revenons à « Nowhere to Go ». Voici un excellent film noir à l’intrigue bien ficelée et qui bénéficie de l’expérience de Seth Holt au montage. Le film commence par la fuite de prison de Paul Gregory. Les dialogues débutent vraiment au bout de 10mn quand dans son bain, Gregory se remémore son coup si bien réussi via un flashback (qui dure une vingtaine de minutes). Puis nous retournons auprès de Gregory dans son bain. Son complice Sloan arrive et ils préparent la suite, fabrication d’un faux passeport et fuite en bateau. Mais, premier imprévu, Bridget (Maggie Smith), la petite amie du propriétaire de l’appartement débarque. Puis quand il veut récupérer son argent gardé dans la conciergerie d’un grand magasin, il tombe sur le flic qui l’a arrêté envoyé en prison. Il part, rentre chez lui, mais tombe sur Sloane qui finalement veut le doubler. Mais il n’a pas l’argent, et maintenant il doit fuir et trouver un endroit où s’abriter, le temps de récupérer son argent.

Le film porte bien son nom (« nulle part où aller » en français) ! Paul Gregory ne sait plus où aller, en qui il peut avoir confiance, ni comment récupérer son butin alors que tous les flics d’Angleterre sont à ses trousses… Ou comment un plan minutieusement monté peut tourner à la catastrophe et mener son auteur à la paranoïa.

L’acteur américain de série B, George Nader, découvert dans l’inénarrable mais rentable « Robot Monster » (1953), obtient ici l’un de ses meilleurs rôles. A ses côtés, on retrouve des seconds rôles classiques du cinéma britannique, Bernard Lee et Geoffrey Keen. Mais surtout, dans son premier rôle crédité au cinéma, l’une des futures stars du petit et grand écran britannique, Maggie Smith.

Malheureusement, le film a été un échec et Seth Holt est retourné dans la salle de montage ( notamment pour le classique de la nouvelle vague « Saturday Night and Sunday Morning« ) avant que la Hammer lui redonne une chance sur « Taste of Fear ».

Bref « Nowhere to Go » profite de bons acteurs, d’une intrigue bien ficelée, d’une réalisation et un montage soignés. Et pour une ambiance réussie, notons aussi deux éléments très importants : la musique jazz du trompettiste d’origine Jamaïcaine Dizzy Reece très réussie et la photographie noir et blanc de Paul Beeson. Mettez tous ces éléments dans un shaker, secouez bien fort, et vous avez un très bon film noir, chant du cygne de l’un des plus grands studios britanniques.

Grâce à SudioCanal, nous avons désormais à disposition une version étendue de 100mn éditée outre manche en DVD en 2013 ( la MGM avait à l’époque exigé à Balcon une coupe d’une dizaine de minutes). Début 2020, quand le réalisateur anglais Edgar Wright demanda au cinéphile Martin Scorsese quels sont les 50 films britanniques qui l’avaient inspiré, celui-ci inclut dans la liste « Nowhere to Go ». Il y a pire recommandation ! D’ailleurs dans sa lite, Scorsese cite quatre films de Seth Hoth alors qu’il n’en à réalisé que six (vous savez ce qu’il vous reste à faire) !

DVD UK. Studio Studiocanal (2013). Version originale avec sous-titres optionnels en anglais