Ecrite par Emeric Pressburger, une jolie romance naïve dans le quartier de Soho. Une lettre d’amour à un Londres qui n’existe déjà plus
Miracle in Soho (1957)
Réalisé par Julian Amyes
Ecrit par Emeric Pressburger
Avec John Gregson, Belinda Lee, Cyril Cusack, Rosalie Crutchley, Ian Bannen, John Cairney, Billie Whitelaw,…
Direction de la photographie : Christopher Challis / Direction artistique : Carmen Dillon / Montage : Arthur Stevens / Musique : Brian Easdale
Produit par Emeric Pressburger pour The Rank Organisation
Tourné aux studios de Pinewood
Drame / Romance
98mn
UK
Michael Morgan (John Gregson) est un as du marteau piqueur qui se pose dans les rues londoniennes au fil des demandes de rénovation de bitume. Morgan est aussi un tombeur et toute sa vie est rythmée par une devise : Quand son boulot est terminé, ses amourettes également. Mais il va devoir revoir ses principes quand il va s’installer rue St Anthony dans le quartier pauvre et bigarré de Soho. Là il va rencontrer Julia Gozzi (Belinda Lee), une belle italienne. Mais le père de celle-ci est sur le point de faire immigrer sa famille au Canada. Quant à Morgan il veut décidément pas se laisser harponner par une femme, si belle soit elle. Bref il faudrait un véritable miracle pour que ces deux là finissent ensemble !
« Miracle in Soho » est une romance naïve sur fond de réalité sociale fantasmée. Dans cette rue de Soho (joliment reconstituée dans le studio de Pinewood) peuplée d’immigrés des quatre coins de la planète, les voisins, bien que pauvres, vivent en harmonie. Il y a une vraie vie de quartier, animée notamment par le facteur Sam Bishop (Cyril Cusack), âme bienveillante qui se méfie de la réputation de Morgan (« il n’y a pas de filles pour vous dans notre rue »). On discute au pub du coin et on fréquente la petite église catholique du bout de la rue (pour ceux qui sont concernés). On entre-aperçoit (très rapidement) des noirs et des asiatiques mais tous les personnages principaux sont européens.
Mais bon on est en 1957, et si à la fin des années 50 les drames sociaux (kitchen sink dramas) commencent à apparaitre sur les écrans, ils restent assez « proprets » (sorti la même année « Woman in a Dressing Gown » est quand même bien plus réaliste !). On est en tout cas encore loin des films coups de poing de la nouvelle vague anglaise. « Look Back in Anger » de Tony Richardson, d’après John Osborne, ne sortira que deux ans plus tard. Une éternité ! De même, Soho ne sera bientôt plus présenté sur les écrans britanniques que comme le quartier du vice. En fait le film emprunte plus au réalisme poétique (surtout au niveau du scénario) qu’au réalisme social.
On apprendra donc sans surprise que « Miracle in Soho » est en fait basé sur un script écrit 23 ans plus tôt ! Le scénariste est loin d’être un inconnu puisqu’il s’agit d’Emeric Pressburger, un immigré hongrois qui avec Michael Powell a constitué le duo le plus créatif du cinéma britannique durant les années 40. Powell et Pressburger viennent alors juste de se séparer après le médiocre « Ill Met by Moonlight » (1956) et il s’agit du premier film en solo de Pressburger depuis une dizaine d’année (si on excepte « Twice Upon a Time » en 1953 dont il assure à la fois le scénario et la réalisation).
Donc ici pas de Michael Powell à la réalisation mais Julian Amyes, formé à la télévision au début des années 50 alors que celle-ci est balbutiante, et qui ne réalisera pour le cinéma que deux films (celui-ci donc et le film de guerre « Hill in Korea » l’année précédente).
Niveau acteurs, on retrouve dans les rôles principaux John Gregson (Genevieve, The Frightened City), et Belinda Lee (une jeune actrice à la beauté sculpturale qui a tourné dans 33 films en Angleterre puis en Italie malgré une mort tragique à l’âge de 25 ans). Les deux ne sont guère convaincants en représentants des classes populaires mais bon est-ce important dans le cas présent ? « Miracle in Soho » est avant tout une lettre d’amour de Pressburger à un Londres qui n’existe alors déjà plus.
DVD zone 2 UK. Studio Strawberry Media (2014). Version originale sans sous-titres