Une production Ealing sur des personnages de l’ombre, les espions et saboteurs envoyés derrière les lignes ennemies avec des chances de survie très faibles. Un drame cruel où l’héroïsme semble vain

Against the Wind (1948)

(Les guerriers dans l’ombre)

Réalisé par Charles Crichton

Ecrit par T.E.B. Clarke d’après une histoire de J. Elder Wills

Avec Robert Beatty, Simone Signoret, Jack Warner, Gordon Jackson, Peter Illing, James Robertson Justice,…

Directeur de la photographie : Lionel Banes / Direction artistiques : J. Elder Wills / Montage : Alan Osbiston / Musique : Leslie Bridgewater

Produit par Michael Balcon pour Ealing Studios

Drame / Guerre

96mn

UK

Durant la seconde guerre mondiale, un prêtre belge, le père Philip (Robert Beatty), réfugié à Londres, intègre une école pour espions et saboteurs destinés à être lâchés derrière les lignes de l’ennemi. Des missions à hauts risques, d’où peu reviennent vivants.

Tourné peu après la fin de la seconde guerre mondiale, « Against the Wind » aborde un aspect de la guerre pas si souvent mis en avant dans les films de guerre (côté britannique on pensera surtout à « Carve Her Name with Pride » sorti en 1958). Sûrement parce qu’il s’agit là d’un combat plus solitaire, souvent ingrat et excessivement dangereux. A part un début assez léger où l’on rencontre les élèves de l’école et l’encadrement, le film prend rapidement des couleurs plus sombres avant même que l’équipe parte en mission. Durant leur formation, ils sont mis face à ce qu’on leur demande vraiment : oublier leur humanité si celle-ci met en péril la mission (même si l’objectif de cette dernière leur parait des plus flous car moins ils en savent…).

Tourné essentiellement à Bruxelles et aux alentours, « Against the Wind » est un film convaincant mais qui parait un peu déséquilibré. Entre la légèreté du début et la plongée dans le côté sombre de la guerre, il y a un grand écart qui peut désarçonner le spectateur. Peut-être aussi parce que le coût humain de la mission est tel que l’objectif en devient absurde, sans qu’il y ait une vraie remise en question de l’autorité. Si à la fin du film on salue de façon classique l’héroïsme de ces personnages, difficile de ne pas avoir dans la bouche un goût amer.

« Against the Wind » est une production Ealing, plus connue du grand public pour ses comédies. Mais elle n’est déjà pas à l’époque novice en matière de films de guerre au ton parfois sombre comme le fameux « Went the Day Well? » (1942) qui raconte la défense d’un village anglais suite à une tentative d’invasion allemande.

Aux commandes nous retrouvons des habitués d’Ealing. Charles Crichton, un monteur promu réalisateur en 1944 avec un autre film de guerre « For Those in Peril » et qui signera par la suite plusieurs classiques de la comédie Ealing (Hue and Cry, The Lavender Hill Mob,..) et tournera jusqu’au début des années 90 (« A Fish Called Wanda« ,…). Au scénario, l’inusable T.E.B. Clarke, l’un des principaux scénaristes du studio.

Le casting est également digne d’attention. L’actrice française Simone Signoret fait ici sa première apparition dans un film anglophone et est utilisée dans l’un des rôles principaux, symbole d’une femme qui s’engage dans la guerre avec les mêmes risques que les hommes. Elle a quelques jolies scènes (notamment face à Jack Warner mais chut). En parlant de Jack Warner justement, celui-ci est la principale surprise du film, dans un rôle à mille lieux des rôles positifs qu’il incarne habituellement (tout comme James Robertson Justice qui joue le rôle du directeur du centre et est plus connu pour ses comédies). Dans le rôle du prêtre belge, le canadien Robert Beatty est un drôle de choix mais il est crédible en ecclésiastique devenu chef d’un groupe de saboteurs qui doit parfois faire des choix difficiles. Depuis la fin des années 30 jusqu’aux années 80, il a été un des visages récurrents du cinéma et de la télévision britanniques.