« King and country » est un film à petit budget, sans concession, co-produit par Losey lui-même, qui se déroule intégralement dans les tranchées de la 1ère guerre mondiale.
King and country (1964)
(Pour l’exemple)
Un film de Joseph Losey
Ecrit par Evan Jones d’après une pièce de John Wilson et un roman de James Lansdale Hodson
Avec Dirk Bogarde, Tom Courtenay, Leo McKern, Barry Foster
Directeur de la photographie : Denys N. Coop
Produit par Joseph Losey et Norman Priggen
Guerre
88 mn
UK
En 1917, coincé dans les tranchées depuis trop longtemps, le soldat britannique engagé Hamp (Tom Courtenay) déserte dans un moment de désespoir. Repris à Calais, il est renvoyé dans sa tranchée et jugé devant un tribunal militaire. Le capitaine Hargreaves (Dirk Bogarde) va assurer sa défense.
Après avoir eu l’insigne honneur d’être sur la fameuse liste noire de McCarhty, le réalisateur américain Joseph Losey a dû fuir les Etats-Unis pour travailler en Europe, et notamment en Angleterre où il signera notamment trois chefs d’oeuvre avec Harold Pinter : « The Servant » (1963), « Accident » (1967) et « The Go-Between » (1971).
Un an après « The servent » qui a connu un beau succès public et critique, et sur un thème similaire à celui de Kubrick pour « Path of Glory » (1957), Joseph Losey décide de filmer l’histoire de Hamp, jeune soldat britannique de 23 ans accusé de désertion.
« King and country » est un film à petit budget (86.000 livres), filmé en 18 jours, co-produit par Losey lui-même et qui se déroule intégralement dans les tranchées.
Pendant tout le film, tourné dans un superbe noir et blanc, nous allons donc arpenter ces tranchées, plongées dans une obscurité permanente, avec pour bande son le bruit assourdissant de la pluie qui n’en finit plus de tomber par torrent, le bruit des canons, l’harmonica de Hamp, et les voix et cris des humains perdus dans cet enfer recouvert de boue. Nous verrons à peine l’extérieur des tranchées (représentées par des photos noir et blanc ou de courtes séquences animées qui illustrent tel ou tel dialogue), jamais un bout de ciel.
C’est ainsi que nous allons assister au destin tout tracé du soldat Hamp, trop humain dans une guerre complètement déshumanisée où finalement tout le monde (même ses camarades) se fiche de son sort. Pendant que Hamp est jugé, ses camarades reconstituent son procès avec un rat qu’ils ont récupéré dans le cadavre d’un cheval. Rat qu’ils finiront par lapider après un procès express.
« Vous avez raconté un tas de mensonges éhontés, n’est-ce pas?… Et alors si vous êtes un rat normal, qui ne mange pas de la chaire vivante, comment expliquez-vous que tous les autres voulaient se débiner en passant par devant, et que vous êtes le seul à être passé par derrière? »
« King and country » est une dénonciation très efficace des effets déshumanisants de la guerre. Dans les tranchées, il n’y a plus tellement de différences entre un rat et un homme.
L’un des points forts du film, en plus de la réalisation sans concession de Losey, est bien entendu l’interprétation délivrée par un sacré duo d’acteurs : Dirk Bogarde, qui a trouvé chez Losey certains de ses plus beaux rôles et y a confirmé une véritable réputation d’acteur capable de tout jouer, et Tom Courtenay qui confirmait ici tout le bien qu’on pensait déjà de lui grâce à ses rôles dans « The Loneliness of the Long Distance Runner » (1962) et « Billy liar » (1963).
DVD Studio Canal. Version française et version originale sous-titrée.