Un mélo parfois en manque de subtilité et une superbe reconstitution du Blitz, mythe national d’union, qui se fracasse ici sur les divisions raciales, thème majeur de Steve McQueen

Blitz (2024)

Blitz (2024)

Ecrit et réalisé par Steve McQueen

Avec Saoirse Ronan, Elliott Heffernan, Harris Dickinson, Paul Weller, Benjamin Clémentine, Kathy Burke, Stephen Graham,…

Direction de la photographie : Yorick Le Saux / Production design : Adam Stockhausen / Montage : Peter Sciberras / Musique : Hans Zimmer

Produit par Tim Bevan, Eric Fellner, Steve McQueen, Arnon Milchan, Yariv Milchan, Anita Overland, Michael Schaefer et Adam Somner pour Apple Studios, Lammas Park, New Regency Productions et Working Title Films

Drame / Histoire / Guerre

120mn

UK / USA

Le titre est un bon indice sur la période et le lieu précis où se déroule l’action du nouveau film de Steve McQueen. Mais étant une co-production britannico-américaine, on vous précise quand même le contexte en début de film. C’est peut-être pas plus mal pour les nouvelles générations.

Le film s’ouvre sur Londres en feu. Des pompiers tentent vainement de clamer le feu, ils perdent le contrôle leur tuyau d’eau qui entame une danse tel un serpent pris de folie. Une jolie touche créative et poétique (clin d’oeil à Humphrey Jennings, documentariste qui a filmé le Blitz ?) pour un film formellement assez classique.

Mais l’originalité du film de McQueen vient non de la thématique (la période du blitz a été largement couverte par le cinéma britannique) ou de la forme mais de la façon dont il aborde son sujet.

L’histoire nous est contée par le regard de Rita (Saoirse Ronan), une jeune femme qui comme beaucoup d’autres participe à l’effort de guerre dans les usines de munitions, et par ceux de son fils George (Elliott Heffernan) qu’elle a eu avec un homme originaire de Grenade et qui a été déporté.

Comme beaucoup de parents, Rita envoie George à la campagne pour sa sécurité. Mais George ne veut pas partir. Il saute du train à la première occasion et décide de rentrer à Londres par ses propres moyens.

Comme on peut l’attendre de la part de l’auteur de la série « Small Axe » (2020), le fait de revenir sur l’un des moments clés de l’histoire britannique du 20e siècle lui permet de replacer les minorités dans la grande histoire où ils n’ont généralement qu’un rôle accessoire. Ce n’est pas toujours très subtil mais McQueen utilise les images d’Épinal de l’identité britannique (l’Empire, le personnage dickensien interprété par Stephen Graham, les refuges souterrains et les métros pour échapper aux bombes,…) afin de donner une voix à ces minorités (surtout africaines et des Indes orientales) et aborder le fait que même dans les moments difficiles, la nation peine à traiter tout le monde de façon égale. On est donc assez loin de l’image d’union nationale généralement célébré par les films sur la période. De fantasme national, le Blitz reprend une place bien contrainte dans une réalité dure et parfois sordide. Même si in fine McQueen se garde de montrer une société trop divisée, l’héroïsme existe et peu venir de tous les côtés.

Steve McQueen n’hésite pas à se lancer dans un exercice assez éloigné de ce qu’il fait habituellement, usant des grosses ficèles du mélodrame, pour porter son message auprès du public le plus large. Ce qui peut surprendre et déstabiliser ceux qui suivent sa carrière mais peut se comprendre par son soucis d’accessibilité. « Blitz » bénéficie en tout cas de tout le savoir faire de Steve McQueen et la reconstitution du Londres de 1940 sous les bombes allemandes est, comme on pouvait s’y attendre, de toute beauté.

En France, comme ailleurs dans le monde, le film a bénéficié d’une sortie en salles limitée (deux jours!) avant d’être distribué sur la plate forme de streaming d’Apple, co-productrice du film où vous pouvez le voir depuis le 22 novembre.