Le moins connu des films noirs de Carol Reed est un chef d’oeuvre malgré ses imperfections et grâce au couple formé par James Mason et Claire Bloom.
The Man Between (1953)
(L’homme de Berlin)
Réalisé par Carol Reed
Ecrit par Harry Kurnitz sur une histoire de Walter Ebert
Avec James Mason, Claire Bloom, Hildegard Knef, Geoffrey Toone, Dieter Krause,…
Direction de la photographie : Desmond Dickinson / Montage : Bert Bates / Direction artistique : Andrej Andrejew / Musique : John Addison
Produit par Carol Reed pour London Film Productions
Filmé à Berlin et aux studios Shepperton
Thriller / Romance
100mn
UK
Susanne Mallison (Claire Bloom) décide de rendre visite à son frère Martin (Geoffrey Toone), médecin à Berlin-Ouest et marié à Bettina (Hildegard Knef), une jeune Allemande. Lors d’une promenade en compagnie de Bettina dans la partie Est de la ville, Susan fait la connaissance d’Ivo Kern (James Mason).
La jeune Anglaise Susanne (Claire Bloom) se rend à Berlin pour voir son frère qui y travaille pour l’armée britannique en tant que médecin. A l’aéroport, elle est accueillie par sa belle soeur, Bettina (Hildegard Knef). Claire remarque rapidement un comportement assez étrange de Bettina et suspecte que celle-ci a une relation avec un autre homme. Ses soupçons semblent confirmés quand elles tombent, lors d’une ballade dans Berlin Est, sur un homme étrange que Betinna semble vouloir éviter, Ivo (James Mason).
Quatre ans après son film le plus connu, le mythique « The Third Man » (1949), Carol Reed filme à nouveau un thriller sur fond de guerre froide. Mais ici Vienne est remplacé par le Berlin et l’histoire se concentre autour d’une romance entre un personnage douteux et une jeune anglaise dans une ville déchirée et en ruines partagée en deux mais pas encore barée par le mur (qui ne sera construit que bien plus tard en 1961). Et Reed a bien raison d’aller y filmer car Berlin est un vértibale décor de cinéma grandeur nature dont l’ombre pesante forme un cadre parfait pour un film noir et cruel.
Reed retrouve aussi James Mason qu’il avait dirigé dans l’un de ses autres chefs d’oeuvre, pour moi son plus grnd film, « Odd Man Out » (1949). Mason est moins magnifique que dans ce dernier mais tout aussi torturé et joue avec toujours autant de conviction. Le personnage d’Ivo Kern est intéressant. Cynique, Kern et est en fait un idéaliste déchu, torturé par ses souvenirs de guerre en France et en Italie. Il trafique dans le Berlin de l’après guerre pour survivre et finit par collaborer avec un truand local qui travaille en sous main pour les autorités soviétiques génées par la fuite de la population qui part se réfugier à l’ouest, surtout quand les fuyards sont des gens importants qui peuvent avoir des informations sensibles. Sa décision d’aider finalement Susanne est pour lui une tentative de rédemption qu’il sait vouée à l’échec.
On a repproché à « The Man Between » son scénario, signé par le vétéran américain Harry Kurnitz, jugé pas toujours crédible et mal équilibré. Reed n’en était apparement lui-même pas satisfait et l’a fait réécrire en partie par Eric Linklater. Néanmoins l’ambiance, l’interprétation et les idées de mise en scène de Reed compensent largement les errances du scénario (et une première partie du coup un peu molassonne ratrappée par la seconde partie, brillante). Dans cette seconde partie (qui commence avec l’enlévément de Susanne), on sent l’influence du cinéma d’Europe continentale avec un accent particulier sur le réalisme poétique français. A la direction photo, Desmond Dickinson livre un noir et blanc somptueux, qui s’il n’égale pas celui de Robert Krasker pour « The Third Man » et « Odd Man Out » reste monumental !
Film un peu oublié aujourd’hui, « The Man Between » fait pourtant partie des chefs d’oeuvre de Carol Reed, parmi ses films noirs, un chouïa inférieur à « The Third Man » et « Odd Man Out », mais du niveau de l’excellent « The Fallen Idol » (1948).
Il y a beaucoup de choses à aimer dans « The Man Between ». L’ambiance sombre, les ruines berlinoises, le couple formé par James Masson et la sublime et touchante Claire Bloom (qui font fi de l’improbabilité de leur couple et dégagent une tension érotique réelle !), et un méchant à la hauteur (intrerprété par l’acteur allemand Aribert Wäscher). Il faut juste accepter de ne pas comparer « The Man Between » à « The Third Man » (même si c’est dur !).
Un jour, je rêve, les cinéphiles arrêteront de faire les imbéciles, et placeront enfin Carol Reed à la place qu’il mérite, celui de l’un des grands maitres du cinéma d’après guerre.
En 2016, Studio Canal a sorti une version blu-ray du film pour le marché britannique dans sa collection Vintage Classic. En attendant une sortie française (on peut rêver !), la disponibilité de ce film en DVD sur notre territoire depuis 2013 est une aubaine à ne pas louper.
DVD FR. Studio Canal (2013). Version originale sous-titrée en français.