The Dark Side of Rock’n’Roll à travers le destin pathétique d’une star fictive (première partie)
That’ll be the day (1973)
Réalisé par Claude Whatham
Ecrit par Ray Connolly
Avec David Essex, Ringo Starr, Rosemary Leach, Robert Lindsay,…
Directeur de la photographie : Peter Suschitzky
Produit par David Puttnam pour Goodtimes Enterprises
Drame / Musique
UK
Dans la Grande-Bretagne des années 50, Jim (David Essex) est un jeune homme qui vit seul avec sa mère commerçante et son grand-père. Son père les a quitté du jour au lendemain, quelques mois après être rentré de la guerre. Obsédé par le fait de prendre la route, il lâche l’école le jour de ses examens et quitte le domicile familial sans rien dire.
« That’ll be the day » forme avec sa suite « Stardust » un témoignage fort intéressant sur la montée en puissance du rock’n’roll dans la Grande Bretagne d’après guerre, son apogée dans les années 60 et sa « mort » dans les années 70 à travers la trajectoire pathétique du chanteur fictif Jimmy McLaine.
Le projet a été initié par le producteur David Puttnam alors en début de carrière. L’idée lui vient d’une chanson semi autobiographique « 1941 » dans laquelle le chanteur Harry Nilsson revient sur le fait qu’il a été abandonné par son père et comment vingt ans plus tard il répète le même schéma. Puttnam propose l’idée à Ray Connolly, journaliste spécialisé dans le rock, qui écrira le scénario des deux films.
Première partie du diptyque, « That’ll be the day » dresse le portrait d’un jeune Jim, déboussolé par le départ soudain de son père à peine revenu de la guerre, qui quitte l’école sur un coup de tête, se retrouve à faire des petits boulots, apprend la vie dans les camps de vacances (on se croirait dans le village du « Prisonnier ») puis sur la route dans une fête foraine ambulante avant de revenir au bercail pour tenter de reprendre sa vie en main… mais il devra alors faire face au racisme social (qu’il va tenter d’exorciser en se mettant en couple avec la soeur de son meilleur ami issu de la classe moyenne) et à ses propres démons. L’appel du large l’emportera sur l’amour de ses proches.
Jim McLaine n’est pas un personnage sympathique. Sa souffrance le pousse vers l’égoïsme et la lâcheté. Le rejet paternel l’entraine à chercher, avec obsession, la reconnaissance sociale, et chamboule complètement les relations qu’il a avec les femmes (sur lesquelles il se venge inconsciemment ou non)… Il suit sa propre voie quels que soient les dommages co-latéraux. Tel un adolescent qui n’arrive pas à grandir.
Même si le portrait psychologique de McLane peut sembler un peu primaire et facile (l’abandon du père comme principal moteur d’ambition mais également d’auto-destruction) , l’interprétation faite par David Essex le rend réaliste. David Essex était lui même également à l’époque un chanteur à la carrière montante qui s’est retrouvé dans le personnage, au point que cela provoque chez lui une crise d’identité : « De nombreuses expériences décrites dans le film me sont vraiment arrivées dans la vraie vie. C’était très chargé émotionnellement. » confiait-il au magazine Mojo 40 ans plus tard.
De nombreuses rock stars sont venues apporter leur crédibilité au film en apparaissant à l’écran. C’est le cas donc d’Essex mais aussi du Beatles Ringo Starr qui joue ici le rôle de Mike, l’ami de galère de Jimmy et petit truant qui le fait rentrer dans la foire foraine (rôle qui sera repris par dans la suite « Stardust » par Adam Faith). On retrouve également Billy Furry ou encore Keith Moon au générique pour ne citer qu’eux.
Le réalisateur Claude Whatham, venu de la télé, a été choisi par Puttnam pour le talent qu’il avait montré en matière de reconstruction historique. Et c’est vrai que « That’ll be the day » est joliment filmé (en grande partie sur l’ile de Wight), quoiqu’un peu trop sage (sur le second volet plus « rock’n’roll », Whatham sera judicieusement remplacé par un Michael Apted venu du monde documentaire).
Il y a une noirceur et une violence dans « That’ll be the day » qui ne fera que s’amplifier dans « Stardust« . Sombre est la voie du rock’n’roll… « Nous étions plus conscients des victimes du Rock’n’roll que de ceux qui avaient réussis. Tellement de personnes étaient déjà mortes » expliquera des dizaines d’années plus tard David Puttnam. Ainsi « That’ll be the day » met à jour la violence réelle d’une période idéalisée et fantasmée à outrance.
DVD Zone 2 Universal Pictures Int Austria Gmbh. Version originale. Sous tires : Danois, Finnois, Italien, Norvégien, Néerlandais, Portugais, Espagnol