Jack Palance démine les bombes encore intactes dans un Berlin en ruine dans une production Hammer et sous la direction de Robert Aldrich
Ten Seconds to Hell (1959)
(Tout près de Satan)
Réalisé par Robert Aldrich
Ecrit par Robert Aldrich et Teddi Sherman d’après le roman de Lawrence P. Bachmann
Avec Jack Palance, Jeff Chandler, Martine Carol, Robert Cornthwaite, Dave Willock, Richard Wattis,…
Direction de la photographie : Ernest Laszlo / Direction artistique : Ken Adam / Montage : Henry Richardson / Musique : Kenneth V. Jones
Produit par Michael Carreras pour Hammer Films et Seven Arts Productions
Drame / Guerre
93mn
UK / USA
Les films mettant à l’honneur les démineurs, tâche ô combien périlleuse, ne sont pas légion. Evidemment côté britannique on se souviendra de « The Small black room » (1949) de Powell et Pressburger. Mais ce dernier est un film atypique et intimiste, alors que « Ten Seconds to Hell » lui prend un autre chemin.
A la fin de la seconde guerre mondiale, cinq ex-soldats allemands, libérés des camps de prisonnier alliés, rentrent à Berlin Ouest. Afin de gagner leur vie, ils décident de s’engager dans le déminage car ils ont de l’expérience dans le domaine. Conscients des risques, ils décident de faire un pari et décident tous de réserver une partie de leur salaire qui ira au dernier survivant du groupe. Karl Wirtz (Jeff Chandler) et Eric Koertner (Jack Palance) qui n’ont jamais été très proches et leur rivalité prend une autre dimension suite à leur attirance pour leur logeuse française Margot (Martine Carol).
La Hammer avait acheté les droits du roman original « The Phoenix » (1955) de Lawrence Paul Bachmann, un scénariste et producteur new yorkais installé en Grande Bretagne où il présida les filiales locales de la Paramount puis de la MGM. La réalisation est confiée à l’Américain Robert Aldrich, qui s’il n’avait commencé sa carrière de réalisateur qu’en 1951, avait déjà dix ans d’expérience en tant qu’assistant réalisateur et à son actif huit films en tant que réalisateur dont le western « Vera Cruz » (1954) et le film noir « Kiss me Deadly » (1955). S’étant mis à dos le boss de la Columbia, Harry Cohn, Aldritch est soudainement disponible pour des projets outre-atlantique.
On retrouve le savoir-faire d’Aldrich dans les séquences de désarmement des bombes, tendues à souhait. Il est bien assisté pour se faire par l’un de ses collaborateurs habituels, le directeur de la photographie hongrois Ernest Laszlo, qui tourne de belles séquences dans un Berlin dont on ne voit quasiment que les ruines, et dans le studio berlinois UFA Studios.
Niveau casting, après avoir pensé au gallois Stanley Baker (un habitué du studio) et aux américains Gregory Peck ou encore Peter Van Heyck, finalement les choix se sont portés pour les rôles principaux sur Jack Palance et Jeff Chandler. Plutôt habitué aux rôles de méchants, Palance trouve ici un rare rôle de héros positif face à Chandler, célèbre pour avoir joué à plusieurs reprises le rôle du chef apache Cochise (notamment dans « Broken Arrow » en 1950). Le face à face marche plutôt bien malgré une situation de contre emploi évidente. Difficile a priori de faire plus confiance à Palance qu’à Chandler. Et Palance garde, à mon avis, ne peut se départir d’un physique très marqué qui rend le moindre de ses sourires inquiétants. Et la romance entre Pierre et Margot (joué par la française Martine Carol) fait assez artificielle, la faute surtout à des dialogues pas toujours très fins.
La relation entre Palance et Aldritch a également posé quelques problèmes pendant le tournage. Pourtant habitués à travailler ensemble, Aldritch n’a pas réussi à convaincre l’acteur de la valeur d’un scénario qu’il trouvait trop bavard et philosophique.
Le principal défaut du film se situe justement dans les dialogues, mais ça va jusqu’au narrateur qui introduit et conclue l’histoire sur le ton d’un commentateur d’actualité. Je ne suis pas convaincu du résultat. Le narrateur nous livre un dialogue glorifiant l’héroïsme et sans nuance qui heureusement est un peu remis en cause dans le film, même si la relation entre Karl et Eric est trop tranchée. L’ensemble manque de dégradés.
Après les triomphes enregistrés par la Hammer dans l’horreur gothique, « Ten Seconds to Hell » était censé apporter un peu de respectabilité au studio via un projet plus classique. Malheureusement, le film, charcuté d’une trentaine de minutes par United Artists, sera rejeté aussi bien par le public que les critiques, des deux côtés de l’Atlantique. En tout cas, s’il n’est pas parfait « Ten Seconds to Hell » reste un film à re-découvrir du fait de son sujet rarement traité, de sa photographie et de la tension qui se dégage des scènes de déminage.
Le film est sorti en 2023 en combo DVD/blu-ray chez l’éditeur français Rimini Editions.
Combo blu-ray/DVD. Studio Rimini Editions (2023). Version originale sous titrée en français et version française.