Comédie dramatique / Fantastique:
Yorgos Lanthimos

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4
On 24 janvier 2024
Last modified:24 janvier 2024

Summary:

Emma Stone campe une "créature monstrueuse" qui s'approprie son humanité et sa féminité par l'expérience d'un monde qui baigne dans l'absurde et la noirceur. 

Emma Stone campe une « créature monstrueuse » qui s’approprie son humanité et sa féminité par l’expérience d’un monde qui baigne dans l’absurde et la noirceur. 

Poor Things (2023)

(Pauvres créatures)

Réalisé par Yorgos Lanthimos

Ecrit par Tony McNamara d’après le roman d’Alasdair Gray

Avec Emma Stone, Willem Dafoe, Mark Ruffalo, Ramy Youssef,…

Direction de la photographie : Robbie Ryan / Production design : Shona Heath et James Price / Montage : Yorgos Mavropsaridis / Musique : Jerskin Fendrix

Produit par Emma Stone et Ed Guiney pour Element Pictures, Film4, Searchlight Pictures

Comédie dramatique / Fantastique

141mn

UK / Irlande / USA

Depuis son premier long métrage en langue anglaise « The Lobster »  en 2015, le cinéaste grec Yorgos Lanthimos peut compter sur l’appuis de Film4 côté britannique et du Irish Film Board côté Irlandais. Si son précédent film, « The Favourite » était une biographie toute en ironie de la reine Anne (incarnée par Olivia Colman), ici il reste sur un sujet britannique en adaptant le roman de l’écrivain écossais Alasdair Gray (1934-2019) qui se déroule dans une version fantastique de l’époque victorienne.

Par son sujet et dans le climat d’hystérie idéologique actuelle, nombre d’internautes ont cru deviner ici une réinvention « woke » de Frankenstein. Sachant donc que le film est basé sur un roman d’un écrivain et peintre écossais publié en 1992, scénarisé par l’australien cinquantenaire Tony McNamara (The Favourite, Cruella,..) pour le réalisateur grec, également cinquantenaire, Yorgos Lanthimos,  il est quand même un peu osé de les soupçonner de « wokisme ».

Par contre, « Poor Things » est un film profondément féministe et individualiste dans le sens où son personnage revendique clairement le fait de choisir de mener sa vie comme elle le souhaite dans une société où l’image de la femme est très corsetée et face à un créateur qui la considère comme un rat de laboratoire. Créée à partir du corps de sa mère par un savant homme-père qu’elle appelle Dieu (Willem Dafoe), encadrée par un étudiant Max McCandles (Ramy Youssef) qui deviendra son prétendant, Bella Baxter (Emma Stone) semble condamnée à ne pas quitter les quatre murs de la maison londonienne paternelle. D’enfant dans un corps de femme, Bella gagne cependant son indépendance en s’appropriant ce corps et en refusant qu’on lui dicte la façon dont il faut l’utiliser. Elle part vers l’aventure et l’inconnu avec gourmandise, s’octroie le droit d’explorer, notamment sur le plan sexuel (central ici), sans se soucier des codes sociaux.

Bella est parfaitement campée par l’actrice américaine Emma Stone, également co-productrice. On retrouve le goût de Yorgos Lanthimos pour l’humour noir et absurde. Visuellement, on est par contre en terrain connu malgré un début en noir et blanc, filmé souvent au grand angle voir au fisheye (angle de champ très grand et déformation à l’unisson). Par contre, même si les images sont très belles, on se retrouve à nouveau dans un univers victorien fantasmé et coloré, où on mêle science fiction, gothique et art nouveau/art déco (proche du « steampunk »), déjà vu à divers degrés dans de très nombreux films (le dernier en date étant « Wonka » sorti en fin d’année). On pense parfois à du Tim Burton pour un public plus adulte.

« Poor Things » a été bien accueilli par la critique. Il a reçu le Lion d’Or à Venise et a été nominé pour onze Oscars. Même si le film a été déconseillé/interdit aux moins de 18 ans de nombreux pays (en France il est classé « tous publics avec avertissement), il a également pu bénéficier d’un bel accueil public (note de 8,4/10 sur imdb) et il devrait terminer à plus de 50 millions de dollars de recettes au box office (si les Oscars ne relancent pas sa carrière).

Sorti dans les salles françaises le 17 janvier 2024.