Les bas fonds de l’East End londonien servent de décor à ce film mélangeant réalisme social et film noir mais souffrant d’un ton un peu moralisateur
No Trees in the Street (1959)
Réalisé par J. Lee Thompson
Ecrit par Ted Willis
Avec Sylvia Syms, Herbert Lom, Ronald Howard, Stanley Holloway, Joan Miller, Melvyn Hayes, David Hemmings, Richard Shaw,…
Directeur de la photographie : Gilbert Taylor / Direction artistique : Robert Jones / Montage : Richard Best / Musique : Laurie Johnson
Produit par Frank Godwin pour Allegro Productions
Tourné à Associated British Elstree Studios
Crime
UK
Dans les années 30, dans le quartier populaire de l’East End, une jeune femme Hetty (Sylvia Syms) rêve de quitter la rue où elle est née et a grandi. Mais elle est coincée entre son frère délinquant Tommy (Melvyn Hayes), sa mère alcoolique (Joan Miller) et le gangster Wilkie (Herbert Lom) qui veut à tout prix qu’il soit sienne.
Dans les années 50, un détective Franck (Ronald Howard) arrête un jeune délinquant (David Hemmings dans un de ses premiers rôle) qui traverse en courant, un couteau dans une main ensanglantée, un terrain vague encadré d’appartements modernes. D’humeur bavarde, il lui raconte l’histoire avant-guerre du quartier pour lui prouver que les choses ont bien changées et en mieux !
Il faut dire que 20 ans auparavant, la rue était insalubre, les gens survivaient d’expédiants dans des petits appartements suintant l’humidité. La famille Martin est un exemple de famille dysfonctionnelle qui survit plus qu’elle ne vit. La mère alcoolique rêve que ses enfants réussissent grâce au tout puissant Wilkie, gangster local. Elle pousse ainsi son fils Tommy à travailler pour le gangster, et sa fille à l’épouser ! Evidemment tout ça finira mal.
La description de la pauvreté de cette rue, décrite comme un enfer sur terre, est saisissante. Le chômage et la misère ont noyé tout espoir dans l’alcool, et la violence comme la mort sont un lot quotidien (voir les réactions des enfants face à la mort).
On comprend la raison du long flashback, mais du coup le film a un côté moralisateur qui sonne comme le discours usé d’un grand père qui a connu la guerre et qui tance son petit fils « trop gâté » à ses yeux. Le jeune ado des années 50, qui a l’impression que sa vie est dure, mériterait juste une bonne fessée ! Il vit dans un logement décent, bénéficie d’une éducation et il y a du travail ! De quoi se plaint-il ?
La réponse se situe dans les films de la nouvelle vague anglaise qui elles s’intéresseront à cette jeunesse des années 50, notamment « Look Back in Anger » sorti la même année ou encore « Saturday Night and Sunday Morning » qui sort l’année suivante. Le problème ? La perte de sens qui mène à un conflit existentiel. A quoi bon vivre si c’est juste pour mourir ? Une question qui a tout son sens dans une Europe secouée par deux guerres mondiales.
Le scénario est dû à Ted Willis, l’un des précurseurs du réalisme social et qui avait déjà scénarisé le précédent film de J. Lee Thompson, l’excellent « Woman in a Dressing Gown » (1957). Ici, Willis appuie un peu trop ses idées, au détriment de la construction narrative. Mais en dépit de son manque de subtilité (à l’image du personnage du flic – héros terne et sentencieux), « No Trees in the Street » reste un bon film, qui mélange social réalisme avec les codes du film noir, et les personnages sont bien dessinés.
Le film bénéficie également d’un excellent casting (Sylvia Syms en tête mais aussi Herbert Lom qui est toujours parfait dans le rôle d’un méchant – par contre je trouve que le jeune Melvyn Hayes en fait un peu trop en matière de folie), de la réalisation solide de J. Lee Thompson et la magnifique photo de Gilbert Taylor (l’un des maitres du noir et blanc).
DVD zone 2 UK. Studio Network (2015). Version originale sans sous titres.