Deux jeunes homosexuels en marge de la société pendant les années Thatcher tentent de s’en sortir. Leur combat est-il perdu d’avance ?
My Beautiful Laundrette (1985)
Réalisé par Stephen Frears
Ecrit par Hanif Kureishi
Avec Daniel Day-Lewis, Gordon Warnecke, Saeed Jaffrey, Shirley Anne Field, Rita Wolf, Derrick Branche,…
Directeur de la photographie : Oliver Stapleton
Musique : Ludus Tonalis
Produit par Sarah Radclyffe et Tim Bevan pour Channel Four Films
Drame
UK
Omar (Gordon Warnecke) est un jeune londonien d’origine pakistanaise. Sa mère s’est suicidée trois ans plus tôt et il s’occupe de son père malade et dépressif. Alors que son père voudrait voir Omar reprendre les études et aller à l’université, Omar décide d’accepter la proposition de son oncle (Saeed Jaffrey) et de reprendre la gestion d’un lavomatic. Aidé par son ami d’enfance, le punk Johnny (Daniel Day Lewis) avec qui il entame une liaison amoureuse, Omar est bien décidé à réussir sa vie.
« My Beautiful Laundrette » est un film qui frappe fort. Alors que les années Thatcher battent leur plein, le film s’attaque à plusieurs sujets polémiques et appuie là où ça fait mal : dans la Grande-Bretagne des années 80, le racisme et l’homophobie sont exacerbés par la violence économique.
Omar est une jeune londonien d’origine pakistanaise qui veut s’intégrer et réussir. Son père, intellectuel respecté dans son pays, rejette l’Angleterre qui l’a si mal accueilli, qui l’a détruit. Omar ne veut pas finir comme son père. S’il ne peut pas s’intégrer intellectuellement (d’où son rejet de l’université), il espère obtenir le respect par la seule valeur qui compte aux yeux de la société : l’argent. Et il prend un certain plaisir cruel à utiliser Johnny, son ami d’enfance devenu punk et raciste, comme homme à tout faire et comme amant. Il y a un peu de sadomasochisme entre Omar et Johnny, mais aussi une forme de compréhension mutuelle et une complicité propres à deux jeunes qui sont exclus de la société et qui doivent se serrer les coudes pour réussir.
Si parfois « My Beautiful Laundrette » enfonce des portes ouvertes (le message est parfois trop appuyé dans les dialogues), il traite le sujet avec sensibilité, n’en fait jamais trop et propose in fine un film très réussi et dont on peut interpréter le message à sa façon. Est-ce qu’Omar suit le bon chemin ? S’il y a une certaine fatalité dans le destin des personnages, elle n’est pas forcément négative et inévitable. Malgré les destins brisés autour d’eux et un contexte difficile, le couple Johnny-Omar délivre un message d’optimisme.
« My Beautiful Laundrette » est le film de la reconnaissance. D’abord pour son réalisateur Stephen Frears. Pourtant en 1985, Frears était déjà un réalisateur pour le moins expérimenté. Il avait déjà signé une vingtaine de séries et téléfilms ainsi que deux films de très bonne facture (« Gumshoe » en 1971 et « The Hit » en 1984). Mais c’est le succès critique et public de « My Beautiful Laundrette », pourtant conçu à la base comme un téléfilm à budget modeste (600.000 £) et tourné en 16mm pour Channel 4, qui lancera sa carrière au cinéma.
Au scénario, on découvre le jeune dramaturge d’origine pakistanaise, Hanif Kureishi. Il va encore signer « Sammy and Rosie Get Laid » (1987) avec Frears avant de s’essayer à la réalisation avec « London Kills Me« (1991) et de continuer sa carrière de scénariste essentiellement avec Roger Michell derrière la caméra.
« My Beautiful Laundrette » offre des rôles en or à ses deux jeunes acteurs principaux : le débutant Gordon Warnecke (qui va faire l’essentiel de la suite de sa carrière à la télévision) et bien sûr Daniel Day-Lewis qui la même année est présent à l’affiche de « A Room with a View« . Deux rôles très différents qui permettent de deviner ses talents d’acteur qui s’épanouiront par la suite.
Le film vient de ressortir en septembre 2015 chez Doriane Films en combo DVD/Blu-ray. C’est l’occasion de redécouvrir ce film important du cinéma britannique des années 80.
Combo DVD / Blu-ray FR. Doriane Films. Version originale sous-titrée en français, version française. n complément : « The Burning », premier court-métrage de Stephen Frears 1961 20 minutes Entretien avec Stephen Frears (septembre 2015) 8 minutes Extrait du film de N.T. Binh « Le cinéma britannique aujourd hui La tradition des francs-tireurs » – 10 minutes