Une comédie très années 70, basée sur une sitcom populaire et dont l’humour est basé sur des stéréotypes racistes. Le témoignage d’une époque révolue ?
Love Thy Neighbour (1973)
Réalisé par John Robins
Ecrit par Vince Powell et Harry Driver
Avec Jack Smethurst, Rudolph Walker, Nina Baden-Semper, Kate Williams, Patricia Hayes, Charles Hyatt,…
Direction de la photographie : Moray Grant / Direction artistique : Lionel Couch / Montage : James Needs / Musique : Albert Elms
Produit par Roy Skeggs pour Hammer Films
Comédie
85mn
UK
Eddie (Jack Smethurst), un ouvrier responsable de syndicat et socialiste habitant à Twickenham, a des relations tendues avec son voisin, Bill (Rudolph Walker), un noir originaire de la Jamaïque, conservateur. Les deux hommes travaillent de plus dans la même société où leur rivalité se perpétue. De leur côté, leurs femmes respectives Joan (Kate Williams) et Barbie (Nina Baden-Semper) boivent le thé ensemble et tentent de calmer les esprits de leurs maris toujours sur le point de se battre ou de se faire des coups tordus.
« Love Thy Neighbour » fait partie de la cohorte d’adaptations de sitcoms à succès qui ont permis de remplir les salles britanniques dans la période de vaches maigres des années 70. La série originale du même nom a été produite par Thames Television et diffusée sur ITV de 1972 à 1976. Durant sa première saison, elle attirait pas moins de 8 millions de téléspectateurs.
« Love thy Neighbour » avait la qualité d’aborder de front un sujet encore tabou, celui de l’intégration des immigrants venus des Antilles britanniques après guerre, la fameuse génération « Windrush ». Prolétaire blanc qui accède à la classe moyenne, Eddie a du mal à accepter qu’un immigré noir ait le même statut social que lui et soit même plus cultivé que lui. Il rabaisse continuellement Bill en le traitant de « nig nog » (nègre), de primitif venu de la jungle dont les ancêtres étaient cannibales. Il se refuse à l’appeler par son prénom, préférant des surnoms comme « Sambo » ou « King Kong ». Le racisme quotidien d’Eddie irrite au plus au point Bill qui se venge en lui peignant la figure en noir alors qu’il fait une sieste ou encore en le plongeant dans une marmite et en dansant autour en sous-vêtement avec ses amis, reproduisant avec moquerie les fantasmes racistes d’Eddie.
Le film comme la série se moque des stéréotypes racistes, des deux côtés, tout en les reproduisant… et ce jusqu’à la représentation des femmes des protagonistes. Ainsi Barbie (!), la femme de Bill, aux formes très prononcées, est forcément volubile et habillée de manière sexy tandis que Joan, la femme d’Eddie, est couverte de la tête aux pieds et est nettement plus réservée.
Déjà à l’époque, la série originale avait été accusée d’amplifier les stéréotypes en leur donnant une tribune, et en montrant les agressions racistes comme des éléments suscitant le rire. On ne s’étonnera pas que la série et le film soient aujourd’hui rarement diffusés… même si je trouve ça dommage. Car c’est indiscutablement le témoignage d’une époque. Et si le racisme évolue, il ne disparait pas juste parce qu’on n’utilise plus certains mots.
Reste que par son outrance et ses blagues potaches, « Love Thy Neighbour » est rarement drôle pour ceux qui ne sont pas sensibles aux stéréotypes raciaux.
A la production on retrouve la Hammer qui avait déjà adapté (avec succès au box office) « On the Buses » (1971), autre série populaire diffusée sur ITV pas vraiment reconnue pour sa subtilité. Malgré un accueil critique plus que tiède, « Love Thy Neighbour » sera également l’un des rares succès de la Hammer durant les années 70.
Blu-ray UK. Studio Network (2016). Version originale avec des sous-titres optionnels en anglais. Bonus : bande annonce, galerie, dossier de presse du film en PDF