Anthony Perkins joue un rôle sur mesure, mélange de Dr Jekyll et Jack l’éventreur, dans une adaptation libre très stylisée et expressionniste du roman de Stevenson

Edge of Sanity (1989)

(Dr. Jekyll and Mr. Hyde)

Réalisé par Gérard Kikoïne

Ecrit par J.P. Félix et Ron Raley d’après Robert Louis Stevenson

Avec Anthony Perkins, Glynis Barber, Sarah Maur Ward, David Lodge, Ben Cole, Ray Jewers,…

Direction de la photographie : Tony Spratling / Production design : Jean Charles Dedieu / Montage : Malcolm Cooke / Musique : Frédéric Talgorn

Produit par Jacques Fiorentino, Edward Simons et Harry Alan Towers

Horreur

90mn

UK / Hongrie

Le livre de Stevenson, publié en 1886, fait partie des livres les plus adaptés, que ce soit à à la radio, sur scène ou à l’écran. Selon le site de référence consacré à RL Stevenson, il en existerait à date de 2012 plus de soixante versions cinématographiques directes (sans compter les parodies ou les inspirations très libres (si vous les ajouter on obtiendrait le chiffre extravagant de 135). Pour the « Edge of Sanity », le site note très justement que le film mélange l’histoire de Jekyll et Hyde avec celle de Jack L’Eventreur sur fond de cocaïne et de sexe sadique. Un bon résumé !

Aux commandes, on retrouve un réalisateur atypique, le Français Gérard Kikoïne, qui a fait carrière comme doubleur et responsable de la post synchro (notamment pour Jess Franco) puis comme réalisateur dans l’érotisme et la pornographie (version classieuse) dès le milieu des années 70 avant de passer au cinéma grand public au milieu des années 80 et d’entamer une collaboration avec le producteur britannique Harry Alan Towers (grand spécialiste des séries B) sur « Lady Libertine » (1984), « Master of Dragonard Hill » (1987) avec Oliver Reed et Ertha Kitt.

On ne s’étonnera donc pas de retrouver de jolies donzelles peu vêtues. Mais pas de virée dans le fantastique comme dans nombre d’adaptations. Si Jekyll se transforme en Hyde c’est suite à la consommation de cocaïne et d’opium qui lui permet de se désinhiber et de laisser libre cours à ses pulsions sadiques. Une petite scène d’intro nous explique brièvement l’origine de ses obsessions (voyeurisme, humiliation,…). Du coup le maquillage qui marque la transformation de Jekyll en Hyde est minimaliste, un teint blanc, des yeux aux contours rougis. Mais bon, quand vous avez un acteur comme Anthony Perkins, est-il vraiment nécessaire d’en rajouter ?

Gérard Kikoïn joue à plein l’esthétique des années 80, avec une Angleterre victorienne remixée (pour les scènes de nuit où Hyde prend le dessus) avec les goûts vestimentaires et les couleurs phares de l’époque (en rouge et noir, comme le chantait Jeanne Mas). Une esthétique qui convient bien à cette histoire et pas désagréable mais qui donne forcément un côté daté à cette version. La photographie joue des distortions, des ombres, des zooms et cadrages baroques et serrés sur le visage de Hyde avec un Anthony Perkins qui adopte un jeu expressionniste et possédé. Et ça marche !

On le sait, après « Pysho » (1960) d’Alfred Hitchcock, Anthony Perkins s’est retrouvé prisonnier du personnage de Norman Bates et a dû laisser tomber les rôles de jeunes premiers pour ceux de psychopathes. Perkins n’a aucun mal à sortir tout l’attirail pour un rôle qui semble fait pour lui (il est d’ailleurs étonnant que ce soit l’unique fois où il endosse le rôle de Hyde). En tout cas, il est gâté avec cette version de Hyde matinée avec Jack l’éventreur ! Perkins, qui allait décéder trois ans plus tard, a joué l’un de ses derniers rôles dans le téléfilm « Psycho IV: The Beginning » (1990) mais ce « Edge of Sanity » reste son dernier grand rôle.

Globalement, cette version très stylisée, parfois à la limite du grotesque, fonctionne très bien et ce « Edge of Sanity » est une bonne surprise, aussi bien pour les fans de Perkins, les amateurs des eighties ou ceux de films d’horreur ultra stylisés.

Il faut noter le joli travail de l’éditeur français Sidonis qui met à notre disposition une très belle copie restaurée avec des bonus passionnants (interviews d’Olivier Père et de Gérard  Kikoïne).

Combo blu-ray/DVD FR. Studio Sidonis (2020). Version française et version originale sous-titrée en français. Bonus : livret de 24 pages, Présentation d’Olivier Père, interview de Gérard Kikoïne