Review of: Zardoz
Drame / SF:
John Boorman

Reviewed by:
Rating:
5
On 15 mars 2021
Last modified:15 mars 2021

Summary:

Longtemps considéré comme un pur nanar, "Zardoz" est pourtant une fable philosophique pessimiste qui mérite d'être prise au sérieux et reste le film le plus personnel de John Boorman

Longtemps considéré comme un pur nanar, « Zardoz » est pourtant une fable philosophique pessimiste qui mérite d’être prise au sérieux et reste le film le plus personnel de John Boorman

Zardoz (1974)

Ecrit et réalisé par John Boorman

Avec Sean Connery, Charlotte Rampling, Sara Kestelman,…

Direction de la photographie : Geoffrey Unsworth / Production design : Anthony Pratt / Musique : David Munrow / Montage : John Merritt

Produit par John Boorman

SF

UK / USA / Irlande

Une tête bouge à l’écran sur un fond noir, un tissu bleu sur la tete, une barbe et une moustache dessinées au feutre. « Je suis Arthur Frayne et je suis Zardoz. Je vis depuis 300 ans et j’attends la mort avec impatience mais je ne la connaitrai pas. je suis immortel… Dans ce conte, je suis faux Dieux de mon métier et magicien par nature. Merlin est mon héros… Je suis celui qui tire les ficelles.. Et vous, pauvres créatures, qui vous a tiré de la glaise ?…Dieu est-il également dans le show-business ? ».

Un paysage désolé, « un film de John Boorman situé dans l’année 2293 ». Des hommes à cheval et à pied, certain masqués à l’image de la tête qui vole dans les cieux et qui atterrit près d’eux. « Dieu soit loué à Zardoz ». Une voix s’adresse à eux. Ils « ont été arrachés à l’animalité pour tuer les « brutes » qui se multiplient et sont légion ». C’est pour ça que leur Dieu leur a confié les armes, outils du bien qui doit luter contre les pénis, outils du mal qui « répandent le fléau de la vie sur terre ». Le message est clair : « Allez et tuez » ! La tête crache les armes dont s’empare les exterminateurs. Parmi eux Zed (Sean Connery) qui brandit un pistole et tire en direction de la caméra.

Mais Zed n’est pas un exterminateurs parmi d’autres. Il réussit à s’introduire dans la tête volante dans l’espoir de découvrir la vérité. En tuant son « Dieu », il va découvrir un autre monde, le « vortex », un monde sophistiqué et paisible, le paradis promis ? Mais que cache cette nouvelle réalité ?

« Zardoz » est un film que seules les années 70 ont pu produire. Une fable philosophie insensée, démesurée, écrite, réalisée et produite par un seul homme, l’anglais John Boorman. Celui-ci, grâce au triomphe de « Delivrance » (1972), qu’il avait également réalisé et produit, a désormais les mains libres.

L’échec fut cinglant et pendant des décennies, « Zardoz » fut relégué au statut de pur « nanar » à gros budget, symbole d’un Hollywood qui aurait perdu pied avec la réalité. La dégaine improbable d’un Sean Connery, moustachu aux cheveux longs, affublé d’un slip rouge, le torse bardé de cartouchières rouges également et les jambes parées de longues bottes en cuir, un sujet de moqueries parfait pour les décennies futures.

Pourtant, même si « Zardoz » peut agacer par sa présomption et son imagerie très seventies, il serait idiot de l’en réduire à une somme de défauts. « Zardoz » reste une petite merveille d’inventivité et de satire sur la recherche du progrès infini qu’il soit politique (démocratie) ou scientifique (immortalité). Un monde soit-disant parfait exclut-il toute forme d’inégalité ? Si « tout le monde » a accès à la perfection, il faut quand même des « ouvriers » pour assurer la production. Et si tout le monde est immortel, comment luter contre « l’ennui » ? L’humain peut-il supporter une vie infinie et parfaite ?

« Zardoz » offre une vision pessimiste de l’évolution de l’humanité et de sa quête sans fin pour plus de confort, pour moins de souffrance, pour plus de contrôle. En ceci, « Zardoz » est un film nihiliste, dont la philosophie préfère l’acceptation de la douleur inée à l’existence plutôt que la recherche d’une perfection inatteignable et corruptrice.

Bref, il est plus facile de se moquer de « Zardoz » que d’en tirer l’impitoyable logique.

« Zardoz » est sans aucun doute le film le plus personnel de Boorman dans sa version pessimiste  et qui trouve quelque part l’explication de sa dureté dans l’autobiographique « Hope and Glory » (1987). Chez Boorman, il y a toujours cet enfant marqué par le blitz et la découverte, bien trop jeune, de la dureté de la vie et du coeur des hommes.

DVD et blu-ray FR. Studio Movinside (2017). Version originale et sous-titrée en français