Triomphe surprise de l’été 2023, le biopic sur le père de la bombe atomique est une jolie réussite, étonnamment sobre, pour Christopher Nolan

Oppenheimer (2023)

Réalisé par Christopher Nolan

Ecrit par Christopher Nolan, Kai Bird et Martin Sherwin

Avec Cillian Murphy, Emily Blunt, Matt Damon, Robert Downey Jr,…

Direction de la photographie : Hoyte Van Hoytema / Production design : Ruth De Jong / Montage : Jennifer Lame / Musique : Ludwig Göransson

Produit par Christopher Nolan, Charles Roven et Emma Thomas

Drame / Biopic

180mn

UK / USA

Par les temps qui courent, où le cinéma a du mal encore à se remettre de la période du Covid et des changements dans la « consommation » des films qu’il a engendré, produire un biopic en IMAX de trois heures à 100 millions de dollars sur le père de la bombe nucléaire J. Robert Oppenheimer peut sembler d’une audace folle. Ce n’est pas une suite (bonjour « Indiana Jones 5 »), ni un film basé sur une licence mondialement connue (« Barbie »). Ce n’est surtout pas un exemple de divertissement qui semble attirer les foules actuelles dans les salles sombres.

Pourtant la réception publique de « Oppenheimer » a surpassé toutes les attentes (il dépassera les 700 millions de revenus au box office et est actuellement, alors que j’écris ces lignes, le 28e film le mieux noté sur IMDB). Bon, il faut dire que l’anglais Christopher Nolan est un cinéaste qui attire généralement des foules suffisantes pour justifier les (gros) budgets de ses films. Mais son récent échec « Tenet » (sorti juste en fin de crise du COVID) a montré qu’il n’est pas non plus à l’abri d’un bide.

Très bavard, mais porté par un casting de stars et une réalisation étonnamment sage de Nolan, « Oppenheimer » est un film qui se veut fidèle à l’histoire de son personnage central et à sa position changeante sur l’utilité de son invention. Si « Oppenheimer » montre lors la conception de la bombe à Los Alamos un optimisme sans faille sur l’arme qui devrait pouvoir stopper toute possibilité de guerre, il se rend compte rapidement qu’une arme est faite pour être utiliser et qu’il vient de donner à l’humanité la possibilité inédite de s’auto-détruire.

Certains critiques ont reproché au film de ne pas montrer suffisamment l’impact humain d’Hiroshima et de Nagasaki, mais ce n’est après tout pas le sujet du film. Ce dernier se concentre sur la personnalité d’Oppenheimer, l’inquisition qu’il a subit durant la guerre froide pour ses sympathies de gauche et ses états d’âme sur la portée de son invention sur le destin de l’humanité.

Mesuré à son objectif,  « Oppenheimer » est incontestablement une réussite. Le déroulement historique et les personnages qui traversent cette histoire sont bien décrits et incarnés par des acteurs de talent. On y croit et on est porté par ce drame aux allures shakespeariennes. Même si le côté bavard et les discussions techniques et politiques peuvent laisser des spectateurs sur la touche. Ou encore le côté un peu froid du personnage, malgré les tentatives de Christopher Nolan et de Cillian Murphy pour le rendre plus humain.

Personnellement, ce qui m’a marqué le plus est le fait qu’avant les premiers essais de la bombe, les scientifiques, dont Oppenheimer, n’était pas à 100% sûrs qu’ils n’entraineraient pas une réaction en chaine consumant tout l’oxygène sur Terre et détruisant ainsi la Terre entière ! Une révélation pour le moins glaçante ! D’autant que les objectifs menant à la création de la bombe étaient politiquement discutables (notamment par rapport aux avancées allemandes en la matière). Et que son utilisation au Japon reste aujourd’hui l’un des grands débats historiques. Etait-ce vraiment nécessaire ? Pour  Harry S.Truman en tout cas, oui, qui balance d’un rictus et d’une remarque moqueuse les réticences d’Oppenheimer…

Dans les salles françaises depuis le 11 juillet 2023.