Un thriller fort et sombre sur fond de guerre civile en Irlande du Nord à l’intrigue « malheureusement » bien trop réaliste.
Harry’s Game (1982)
(Le tueur de Belfast)
Réalisé par Lawrence Gordon Clark
Ecrit par Gerald Seymour d’après son roman
Avec Ray Lonnen, Derek Thompson, Maggie Shevlin, Gil Brailey, Geoffrey Chater,…
Direction de la photographie : Alan Pyrah / Montage : Tim Ritson / Production design : Mike Long / Musique : Mike Moran et Clannad
Produit par Keith Richardson pour Yorkshire Television
Thriller
3x50mn (mini-série) / 130 mn (version film)
UK
L’IRA envoie un tueur Billy Downes (Derek Thompson) à Londres pour assassiner un ministre. Une fois le meurtre exécuté, il réussit à s’échapper. Décidé à ne pas laisser ce crime impuni, le premier ministre britannique demande à ce que soit envoyé à Belfast un agent infiltré Harry Brown (Ray Lonnen) sans prévenir les autorités militaires locales. Se faisant passer pour un marin de la marine marchande, Harry s’installe dans une pension du quartier de Falls Road. Là il a une aventure avec une catholique qui l’emmène dans un pub du quartier où il croise pour la première fois, sans le savoir, Billy Downes. Mais sur l’oreiller, sa conquête lui dit qu’une jeune femme s’est vanté ce soir-là d’avoir couché avec l’homme recherché par les autorités britanniques. La traque peut commencer. Harry est sur la piste de Downes, tandis que l’IRA le recherche et que les autorités militaires tentent à la fois de coincer le meurtrier et de mettre la main sur Harry devenu incontrôlable.
« Harry’s Game » est à l’origine une mini-série en trois épisodes de 50mn diffusée sur ITV à l’automne 1982. Une version « film », raccourcie à 130 minutes, montée pour l’export, a été récompensée au festival international de Locarno, et est sortie en vidéo sur différents territoires. En France, la version film de « Harry’s Game » a été édité en DVD en 2008 sous le nom du « Tueur de Belfast ». C’est cette version que je chronique ici.
« Harry’s Game » est tirée par son auteur, le romancier britannique Gerald Seymour, de son premier roman éponyme publié en 1975. La réalisation est confiée à Lawrence Gordon Clark, un metteur en scène chevronné qui a débuté à la BBC au milieu des années 60 avant de rejoindre Yorkshire Television, une franchise du réseau ITV.
Mini-série de prestige, sur un sujet difficile, « Harry’s Game » marche sur des œufs. Le 27 août 1979, Lord Mountbatten et plusieurs autres personnes meurent dans l’explosion d’une bombe cachée sur son bateau. Le même jour, 18 militaires britanniques sont tués par une autre explosion. Plus récemment, en 1981, la grève de la faim entamée par des prisonniers irlandais conduit au décès de Bobby Sands, proclamé héros national, et de neuf autres membres de l’IRA. Et quelques mois avant la diffusion de « Harry’s Game », l’IRA fait exploser des bombes lors de cérémonies militaires à Londres, faisant onze morts.
Si « Harry’s Game » est avant tout un thriller, son scénario qui décrit l’assassinat d’un ministre britannique par l’IRA et la chasse à l’homme qui s’ensuit, demeure aussi réaliste en 1982 qu’il l’était à l’époque de la publication du roman d’origine sept ans plus tôt. On ne s’étonnera pas de savoir que le tournage a eu lieu en majorité dans le Yorkshire, et que l’équipe se soit contenté de quelques plans généraux tournés à Belfast.
Evidemment, les méthodes violentes et cruelles de l’IRA sont stigmatisées. Mais l’assassin de l’IRA, Billy Downes, n’est pas décrit comme un illuminé. Il a des doutes, une famille qu’il aime. Il est le jouet (consentant) de la manipulation de l’IRA car il croit à la cause irlandaise. L’IRA qui ne montrera aucune pitié à l’exploiter au maximum pour arriver à ses fins de déstabilisation. En face de lui, Harry Brown est un agent britannique qui croit fermement à la politique de revanche. Il faut attraper l’assassin, le tuer. Il n’a aucun doute sur sa mission.
A la fin, il est difficile d’avoir une quelconque sympathie pour l’IRA, mais guère plus pour les autorités britanniques, ni pour le personnage d’Harry. « Harry’s Game » est l’histoire d’un gâchis de vies humaines. Deux fois dans la série, et notamment à la fin, Gerald Seymour cite le poème écrit par une fille dont le père a été tué par l’IRA en 1973 : « Ne pleure pas, dit maman. Ils ne sont pas réels. Papa l’était mais il n’est plus là. Ne sois pas amère, dit maman. Ils se sont fait beaucoup plus de mal à eux-mêmes. Ils peuvent marcher et courir, papa non ».
A noter que la très belle chanson de générique de « Harry’s Game », interprétée par le groupe irlandais Clannad, a été un gros succès à l’époque dans les charts irlandais et britanniques.
« Harry’s Game » est un très bon moment de télévision, même dans sa version raccourcie. Si vous pouvez passer outre la qualité très médiocre de l’image du DVD français, je vous le conseille fortement.
DVD zone 2 FR. Studio Seven (2008). Version originale sous-titrée en français et version française.