Une adaptation du chef d’oeuvre de Tolstoï plein de parti pris qui peuvent charmer ou agacer.
Anna Karenina (2012)
(Anna Karenine)
Réalisé par Joe Wright
Ecrit par Tom Stoppard d’après le roman de Léon Tolstoï
Avec Keira Knightley, Jude Law, Matthew Macfadyen, Domhnall Gleeson,…
Produit par Tim Bevan et Paul Webster pour Working Title Films, Focus Features, Universal Pictures
Drame
129 mn
UK
Russie, 1874, la belle Anna Karénine jouit de tout ce à quoi ses contemporains aspirent : mariée à Karénine, un haut fonctionnaire du gouvernement à qui elle a donné un fils, elle a atteint un éminent statut social à Saint-Pétersbourg. Mais elle va succomber au charme du comte Vronsky, un jeune militaire et mettre en péril sa situation sociale par amour.
Le roman de Tolstoy a déjà été de nombreuses fois adapté au cinéma. En Angleterre, notablement en 1948 avec Vivien Leigh dans le rôle principal et avec une réalisation signée Julien Duvivier. Ici c’est Joe Wright qui s’empare du projet. Ce jeune réalisateur londonien (il est âgé de 40 ans) a d’abord commencé à la télévision où il a travaillé avec quelques scénaristes au futur prometteur : Bryan Elsley (futur créateur de la série ado trash « Skins ») et Russel T. Davies (l’homme qui a relancé la mythique série « Dr Who ») .
Au cinéma, il s’est fait remarqué notamment pour des adaptations de grandes épopées romantiques à l’esthétique très léchée « Orgueil et préjudices » (Pride & Prejudice, 2005) et « Reviens-moi » (« Attonement », 2007). Si avec ces deux derniers films, il s’était un peu éloigné du genre, le revoici donc qui s’immerge à nouveau dans un style qui lui a bien réussi.
Le film a été quasiment entièrement tourné dans un théâtre construit de toute pièce dans les studios de Shepperton. Une décision majeure qui donne au film une identité visuelle très particulière mais qui a été incroyablement prise au dernier moment par Wright, à peine deux mois avant le début du tournage. Personnellement, je trouve ce choix très judicieux, cela permet d’enlever un peu de la lourdeur des reconstitutions d’époque trop rattachés au souci d’une reproduction précise, vue mille fois, et qui ne suffit pas à faire un bon film. Cela accentue aussi l’un des points majeurs du film, le fait que Anna Karenine doit constamment subir le regard de la haute société, faire attention au moindre de ses gestes (c’est justement ce manque de retenue que lui reproche son mari) comme si elle était constamment en représentation.
Le seul personnage à avoir le droit de s’échapper régulièrement du théâtre en question est Constantin Levin, homme droit et simple, qui passe une bonne partie de son temps dans son domaine, loin de la scène St Petersbourgeoise. Personnage auquel Tostoï s’identifiait.
On reconnait bien la patte visuelle de Wright dans la mise en scène d’ « Anna Karenina ». C’est visuellement sublime, mis en scène de façon fluide (la scène du bal est assez exceptionnelle), même si on peut être agacé par le côté artificiel et sur-esthétisant des choix de mise en scène. Personnellement, je trouve toujours ça moins lourd qu’un film en costumes aux plans fixes tirés en longueur.
Pour cette nouvelle version d’Anna Karenine, c’est pas moins que le célèbre et prolifique dramaturge et scénariste Tom Stoppard qui s’est penché sur l’oeuvre de Tolstoy. Je n’ai pas lu le roman original, je ne me prononcerai donc pas sur la fidélité de l’adaptation, mais j’ai apprécié la qualité des dialogues et les nuances dans les personnages (notamment Karenine très bien interprété par un Jude Law méconnaissable). A part sa lecture féministe évidente, « Anna Karenina » est aussi un film sur une société inégalitaire au bord de l’effondrement (certains critiques ont cependant reproché à Stoppard d’avoir trop gommé l’aspect politique du roman).
L’interprétation est de haut niveau (Jude Law cité plus haut, mais également Matthew Macfadyen dans le rôle du frère volage d’Anna et Domhnall Gleeson dans le rôle de Levine). Je suis moins convaincu par Keira Knightley, actrice fétiche de Joe Wright, et que je trouve moyennement convaincante, et plus grimaçante qu’expressive.
Si vous n’aimez pas les films trop stylisés « Anna Karenina » est à éviter, par contre dans le genre film d’époque et adaptation d’un classique de la littérature, c’est l’un des films les plus réussis qu’il m’ait été donné de voir dernièrement.
Blu-ray ou DVD FR. Studio Universal Pictures France (2013). Bonus blu-ray : Scènes coupées (HD)
« Anna Karenine : une histoire d’amour épique » (HD)
« Adapter Tolstoï » (HD)
« Keira dans le rôle d’Anna » (HD)
Sur le tournage avec Joe Wright (HD)
Les costumes d’Anna (HD)
Anna Karenine : images en accéléré (HD)
Commentaire audio de Joe Wright