Une reconstitution classieuse et assez fascinante des premières années de règne d’Elisabeth II. Une somptueuse saga un brin soap qui arrive à maintenir l’intérêt malgré les limites du genre

The Crown (2016) Netflix

The Crown (2016)

Créé et écrit par Peter Morgan

Réalisé par Stephen Daldry, Philip Martin, Benjamin Caron, Julian Jarrold

Avec Claire Foy, Matt Smith, Vanessa Kirby, John Lithgow, Jeremy Northam, Jarred Harris, Victoria Hamilton,…

Direction de la photographie : Adriano Goldman et Ole Bratt Birkeland

Musique : Rupert Gregson-Williams

Produit par Andrew Eaton, Michael Casey et Faye Ward pour Left Bank Pictures

Disponible en VOD sur Netflix depuis le 6 novembre 2016

Saison 1 : 10x50mn

UK/USA

Alors que la princesse Elizabeth (Claire Foy) se marie avec Philip Mountbatten (Matt Smith), la santé du roi George VI (Jarred Harris) décline. Au niveau politique, Winston Churchill (John Lithgow) retrouve le poste de premier ministre, mais il n’est plus non plus de première jeunesse. Elizabeth va bientôt devoir monter sur le trône et accompagner le pays dans les changements de l’après-guerre.

thecrown2016affiche« The Crown » est la série événement de l’automne 2016 pour Netflix. Cette co-production américano-britannique est des plus ambitieuse : retracer l’histoire du règne d’Elisabeth II, personnage emblématique mais finalement mystérieux, et surtout toujours en place. La série a pour ambition non se débarrasser des oripeaux de la monarchie mais de soulever un peu le voile sur ces personnages historiques qui ont participé à façonner le Royaume Uni d’aujourd’hui.

Et puisqu’il n’est pas question de faire n’importe quoi avec un tel sujet, c’est donc le dramaturge et scénariste Peter Morgan qui s’attelle à la tache. Ce dernier est spécialiste des biographies historiques (The Damned United, Forst/Nixon ou encore Rush) mais surtout il a signé l’un des modèles du genre, par ailleurs consacré au même personnage que la série de Netflix : le fameux « The Queen » (2006) pour Stephen Frears.

Sauf que « The Crown » fait dans la saga historique à gros budget (100 millions de dollars aurait été investi pour 10 épisodes), la première saison allant approximativement du mariage d’Elizabeth II avec le personnage contesté Philip Mountbatten en 1947 a à la retraite de Churchill en 1955. Et bien sûr, la série utilise assez régulièrement des flashbacks pour donner des détails sur l’enfance d’Elizabeth.

Comme on pouvait s’y attendre, la reconstitution est sublime et les acteurs sont parfaits. Pour un tel projet c’est quand même le minimum. Et la période est suffisamment riche en événements personnels et historiques pour rendre captivant le début de règne d’Elizabeth II. La série ne peut pas ignorer les différentes controverses, sandales et événements qui ont agité la famille royale et marqué la société anglaise à la fin du règne de George VI et au début du règne d’Elizabeth II. L’après-guerre est évidemment une période très riche de l’histoire britannique. On y croise bien entendu une figure imposante comme Churchill (magnifiquement interprété par John Lithgow), mais sinon la série reste assez centrée sur la famille royale et son entourage immédiat. Les figures culturelles sont aux abonnés absents.

Bref tout ça fait de « The Crown » une somptueuse saga un brin soap qui arrive brillamment à maintenir l’intérêt malgré les limites du genre (il y a évidemment beaucoup de situations romancées tout en s’efforçant de rester dans le politiquement correct – pas question ici de donner une mauvaise image de la famille royale – chaque polémique est plus ou moins implicitement excusée par la difficulté d’être roi/reine).

Mais alors que la commande d’une deuxième saison vient d’être annoncée, on peut se demander comment Peter Morgan va réussir à maintenir l’intérêt sans se perdre dans les insignifiances de la vie royale. « The Crown » raconte le destin d’une jeune femme normale et un peu banale (son manque de caractère et de culture est souvent mis en avant) face au poids des responsabilités morales et de la représentation constante du pouvoir monarchique.

Je ne suis pas historien, mais il me semble bien que si Elizabeth II a vécu un début de règne très agité, les années 50 et 60 ont été plus calmes si on peut dire. Donc espérons que la deuxième saison ne se perdra pas dans des histoires de coucheries ou des historiettes et détails sans intérêt. La fin de l’empire britannique, avec notamment la crise de Suez, peut notamment encore donner lieu à un fil rouge assez fort (même si la décolonisation était bien amorcée avant et est déjà traitée dans cette première saison) comme la mutation de la société britannique dans les années 60. La série peut aussi décider d’accélérer le rythme.

On verra bien où nous mène Peter Morgan par la suite mais cette première saison atteint parfaitement son ambition et évite pour l’instant la froideur d’une reconstitution historique trop rigide et empesée.

Actuellement disponible sur Netflix depuis le 4 novembre. Edition DVD/Blu-ray non encore annoncée.