Tony Scott

Tony Scott, le plus jeune des frères Scott, s’est suicidé le 19 août 2012 en se jetant du haut d’un pont de Los Angeles. Il avait 68 ans.

Alors que les cinéphiles reconnaissent un talent indéniable à son frère ainé (surtout grâce à ses toutes premières oeuvres « The Duellists« , « Alien » ou encore « Blade Runner »), Tony n’a jamais bénéficié de la même mansuétude. Le nom de Tony Scott reste attaché à des films pas vraiment réputés pour leur finesse : « Top Gun », « Le flic de Beverly Hills 2 », « Jours de tonnerre »,… Des films d’action calibrés pour le box office. Mais peut-on les qualifier pour autant de navets ?

Comme le souligne ecranlarge.com dans un article indigné, Éric Libiot (L’Express) et Jérémie Couston (Télérama) n’ont pas appuyé sur la touche pause à l’occasion de la mort du cinéaste et ont rappelé à quel point l’oeuvre de celui-ci est dénuée d’intérêt. « On ne va pas jouer les hypocrites affligés: Tony Scott, qui vient de se donner la mort à 68 ans, n’était pas le plus grand metteur en scène du monde » écrit ainsi Eric Libiot. Pour sa part, Jérémie Couston est tout à fait d’accord : « Inutile de jouer les hypocrites. Les films de Tony Scott ne sont pas meilleurs depuis qu’il s’est jeté dans les eaux du port de Los Angeles depuis le pont Vincent Thomas…  les films de Tony Scott ont quelque chose de fascinant dans leur laideur publicitaire assumée. »

Pour autant, tout n’est pas mauvais dans la filmographie de Tony Scott comme le rappellent Libiot et Couston eux-même. Quelques films méritent d’être regardés : par exemple : (n’en déplaise ici à Ecranlarge.com) son deuxième film (et non son premier) : « The Hunger » (Les prédateurs, 1983) film de vampires à l’esthétique très léchée, avec de la personnalité et qui bénéficie d’un joli casting : David Bowie, Catherine Deneuve et Susan Sarandon. « The Hunger » est le deuxième film de Tony Scott et son dernier film anglais. Le réalisateur poursuivra le reste de sa carrière  à Hollywood.

De sa période américaine, on pourra retenir « True Romance « (1993) sur un scénario de Tarantino, le thriller « Ennemi d’Etat » (1998).

On peut aussi rajouter « Domino » (2005), biographie romancée de la fille de Laurence Harvey (Room at the top), ancien mannequin,  DJ, droguée et chasseuse de primes. Tony Scott avait pris contact avec Domino suite à un article dans le Daily Mail et s’était lié d’amitié avec la jeune femme.

Reste que les films de Tony Scott ne sont guère fait connaitre pour leur profondeur psychologique. Voir son premier film est ainsi une expérience d’autant plus étonnante et montre une facette totalement inédite du réalisateur qui en signe de plus pour la première et unique fois le scénario.

Le premier film de Tony Scott n’a probablement pas été vu ni par Libiot ni par Couston. Il n’est d’ailleurs pas mentionné dans leurs articles respectifs. Il s’agit du pourtant très bon moyen métrage « Loving Memory » (1970) récemment ressortit en DVD/Blu-ray par  le BFI. Un film en noir et blanc, pratiquement sans aucun dialogue, sur la mort et les souvenirs laissés par les disparus (je vous invite à lire mon article sur « Loving Memory » ici).

Comme Ridley, Tony a été essentiellement formé à la publicité (et contrairement à son frère ainé il n’est pas passé par la case BBC). Mais il se voyait plus peintre ou documentariste que réalisateur de fictions, et ce sont les encouragements de Ridley qui feront pencher la balance.

Sa mauvaise perception par les critiques, il ne l’a pas bien vécue :

En 2010, comme le rappelle Jérémie Couston, il déclarait à Paris Match :

« Les critiques me tuent à chaque fois. Mon premier film, Les Prédateurs a été détruit. Top Gun, n’en parlons pas. Ridley et moi, surtout moi en fait, sommes toujours épinglés parce que l’on vient du monde de la publicité. Nous sommes des stylistes, donc dénués de contenu. On a trop bien marché dans les années 90, époque où les Brits étaient les putains de sauveurs du cinéma, on a réinventé l’industrie avec Thelma et Louise pour lui, ou True Romance pour moi. »

Evidemment, il est peu probable que le manque de reconnaissance critique explique à lui seul le geste de Tony Scott. On ne sait d’ailleurs  même pas s’il s’agit de l’une des causes de son suicide. Je ne suis pas le plus tendre envers ce réalisateur spécialisé dans les blockbusters, mais une chose est sûre, Tony Scott mérite un hommage pour ses films, pour son rôle avec son frère en tant que producteur, et tout simplement pour son amour des images qui bougent (un amour qui nous guide tous, non?)