Ken Russell

(1927-2011)

Ken Russell est sûrement l’un des réalisateurs britanniques les plus originaux et les plus controversés de sa génération. A l’inverse de nombre de cinéastes britanniques issus des années 60 et 70, Ken Russell n’a jamais été tenté par le réalisme social : « La réalité est un gros mot en ce qui me concerne. Je sais que ce n’est pas le cas pour tout le monde, mais moi ça ne m’intéresse pas. Il y en a déjà beaucoup trop. »

Ken Russell s’est fait une spécialité des films excentriques, visuellement très forts, provocants, qui prennent de nombreuses libertés avec leur sujet (même quand il s’agit d’une biographie), et toujours à la limite d’un mauvais goût revendiqué (limite parfois allègrement franchie).

Il n’est donc guère étonnant qu’il ait filmé la quasi totalité de ses grands succès dans les années 70, peut-être la seule décennie capable d’accueillir un tel électron libre. Les années 80 marqueront déjà une baisse de régime, et il sortira son dernier film en salles en 1991 (« Whore« ).

Pourtant il ne faudrait pas penser que Ken Russell demeurait inactif. Formé à la télévision anglaise (pour laquelle il filme des documentaires dès 1959), il continuera à y travailler régulièrement jusqu’en 2002 (encore une biographie d’un compositeur : « Elgar: Fantasy of a Composer on a Bicycle »).

Il fera ses débuts au cinéma avec la comédie sexy « French dressing » en 1964, mais son premier film d’envergure est un film de commande d’espionnage, le très réussi « Billion Dollar Brain » (1967) avec Michael Caine reprenant son célèbre rôle d’Harry Palmer. il continuera dans une facture faussement classique avec « Women In Love » (1969), une romance adaptée de DH Lawrence, « The Music Lovers » (1970) sur Tchaikovsky ou encore « The Devils » (1971), chef d’oeuvre ultra-provoquant sur la corruption de l’église catholique (et premier véritable pavé dans la marre signé Ken Russell – il faudra attendre 2012 pour voir le film dans une version correcte – toujours censurée mais non expurgée – en DVD).

Autres oeuvres notables et à la limite de l’expérimental : l’opéra rock « Tommy » (1975) basé sur l’album conceptuel du groupe de rock The Who, « Altered States » (1980) qui suit les expériences d’un scientifique qui teste sur lui-même les effets de drogues hallucinogènes très puissantes, « Gothic » (1986) qui retrace de manière érotico-fantastique la nuit où Mary Shelley a créé Frankenstein.

Pour quelqu’un qui n’aime pas la réalité, Ken Russel a signé une majorité de documentaires. Et même quand il fait des fictions, Ken Russel affectionne les biographies d’artistes (Tchaikovsky, Liz, Coleridge, Mahler, Strauss, Henri Gaudier-Brzeska,…). Mais il donne à ses films un cachet personnel où la folie et l’extravagance ne sont jamais loin.

A noter que sa production TV et cinématographique n’est pas toujours bien distribuée. Espérons que suite à son décès le 27 novembre 2011, les éditeurs se pencheront à nouveau sur son oeuvre, dont la partie télévisée reste actuellement largement indisponible sauf à travers un coffret DVD « Ken Russell at the BBC » (qui regroupe six « documentaires » d’artistes) mais disponible pour l’instant seulement en zone 1 (UPDATE 2020 : le BFI a depuis ressorti – en 2016 – ses fameux docu-fictions dans deux coffrets combos DVD/Blu-ray « Ken Russell: The Great Composers » et « Ken Russell: The Great Passions »).

Principaux films :

French Dressing (1964)
Billion dollar brain, 1967
Love, 1969
The Music Lovers (La symphonie pathétique), 1970
The Devils (Les Diables), 1971
The boy friend, 1971
Mahler, 1974
Tommy, 1975
Lisztomania, 1975
Altered states (Au-delà du reel), 1980
Crimes of Passion, 1984
Gothic, 1986
The Lair of the White Worm, 1988
Whore, 1991