DerekJarman-TheAngelicConversation

(Photo Annie Chancel, Objectif Image 30 Nîmes)

J’arrive au terme d’une semaine très bien remplie. Participer à un festival, surtout quand il est de la qualité de celui des Ecrans Britanniques, est toujours un moment de bonheur. Lâcher un cinéphile dans un festival de cinéma, c’est comme donner à Charlie les clefs de la chocolaterie (je m’explique d’ailleurs de ce plaisir dans un petit billet rédigé pour la Bibliothèque de Nîmes que vous pouvez découvrir ici).

Evidemment, je n’ai pas pu voir tous les films que j’aurais aimé pour des raisons de timing, mais cette année encore mon passage à Nîmes aura été riche en rencontres, discussions et découvertes.

Au niveau des films, j’ai eu le plaisir de découvrir un très bon Kenneth Branagh avec la comédie shakespearienne « Much Ado about nothing » (1993). Le casting est bien entendu exceptionnel : Emma Thompson, Denzel Washington, Michael Keaton, Keanu Reaves,…  Mais surtout Brannagh livre une comédie équilibrée et très efficace.

« Hector » (2015) est le premier film de Jake Gavin. On y suit les traces d’un SDF écossais (interprété par le toujours très bon Peter Mullan) qui descend à Londres comme chaque année pour fêter noël dans un centre d’accueil de la capitale. Le film vire un peu trop vers le mélodrame, mais reste plaisant.

« Pursuit » (2014) de Paul Mercier est un film irlandais qui était présenté par son acteur principal, Barry Ward. Histoire d’amour impossible entre la fille d’un chef mafieux et l’un de ses hommes de main, le film hésite entre comédie, thriller, romance, et finalement s’y perd un peu. Surtout, Paul Mercer est un homme de théâtre et sa maitrise du cinéma reste encore perfectible.

J’ai aussi profité du festival pour revoir au moins un des films de Michael Radford qui était l’invité d’honneur du festival : « Il Postino » (Le facteur). Ce film reste son plus grand succès public, et en le revoyant aujourd’hui je comprends pourquoi. La rencontre des deux acteurs Philippe Noiret (dans le rôle du poète Pablo Neruda) et de Massimo Troisi (dans le rôle d’un facteur amoureux) marche merveilleusement bien. Et si la dernière partie tombe un peu dans le mélodrame, les deux premiers tiers offrent de grands moments de comédie et d’émotion.

Enfin, j’ai découvert une version de « Romeo & Juliet » que je ne connaissais pas et qui a été récemment ré-éditée en DVD en France, celle de 1954 signée Renato Castellani. S’il a vieilli et prend de grosses libertés avec le texte de Shakespeare, le film a remporté un Lion d’Or, et bénéficie d’un couple lumineux (Laurence Harvey et Susan Shentall pour sa première et dernière apparition à l’écran). J’ai aussi apprécié les très belles images du directeur de la photo Robert Krasker (The Third Man) dont certaines filmées dans les rues de Vérone.

Mais le festival Ecrans Britanniques propose aussi des spectacles ambitieux mêlant cinéma et performances en live. J’ai ainsi assisté à un ciné-concert silent films on Shakespeare, qui proposait la projection de six petits films muets adaptés de Shakespeare et réalisés au début des années 1910. Ces films était illustrés sur scène par la musique de Virgile Goller et Florian Doidy. L’intérêt cinématographique de ces six petits films étant quand même assez limité, la musique était la bienvenue et a permis de livrer un résultat qui dépasse le simple intérêt historique.

Plus convaincante à mes yeux, la projection de The Angelic Conversation, un film expérimental tourné en 8mm par Derek Jarman au milieu des années 80. La projection était accompagnée d’un récitant (Olivier Normand) déclamant avec conviction et talent les sonnets de Shakespeare (avec une traduction inédite à l’écran de Luz Aflallo). La musique interprétée, sur scène également, par Benjamin Garnier et Alexandre Le Hong, donnait à l’ensemble un côté quasiment hypnotique. Il faut saluer cette belle et audacieuse collaboration des Ecrans Britanniques avec le théâtre de Nîmes et qui a permis la concrétisation de ce spectacle conçu par Bruno Geslin.

Vendredi, j’ai assisté à la conférence d’un grand passionné de l’animation, Alexis Hunot. Illustrant son propos avec de nombreux extraits, il a livré une prestation très convaincante sur un thème a priori pas si facile : « Shakespeare dans le cinéma d’animation« .

J’ai conclu ma présence au festival par une présentation de « All Night Long » (1962) de Basil Dearden que j’avais sous-titré en français pour l’occasion. J’étais un peu nerveux, d’autant que la salle comptait deux grands spécialistes du cinéma britannique : Philippe Pilard et Francis Rousselet (directeur artistique du festival). L’accueil du public a dépassé mes espérances. Tant mieux ! C’est toujours un très grand plaisir de faire redécouvrir un beau film qui mériterait de ne pas tomber dans l’oubli.

Je tiens à remercier chaleureusement les Ecrans Britanniques pour leur accueil  (je ne citerai pas de nom de peur d’oublier quelqu’un mais quelle équipe !). C’est toujours un immense plaisir de venir à Nîmes et de rencontrer ces passionnés qui tiennent ce festival depuis déjà 19 ans. A l’année prochaine pour la 20e édition !

Le site des Ecrans Britanniques : http://www.ecransbritanniques.org